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droite, » il songeait à tourner cette difficulté. « En vue d’éviter tout retard dans l’action continuelle sur l’ennemi et de le surprendre par une nouvelle attaque sur une partie désorganisée du front, » écrivait-il à Pershing, il avait fait préparer par le général Pétain une offensive en Lorraine ; déjà des plans étaient à l’étude pour que la 2e armée américaine (Bullard), en avançant entre Meuse et Moselle en direction de Longwy, pût se jeter sur Briey. Ainsi Metz serait-elle débordée à l’Ouest par Bullard comme par Mangin à l’Est. Le 4 novembre, celui-ci installait son quartier général en Lorraine et ses quatre corps d’armée se massaient en avant de Nancy.

Ainsi, tout est prêt pour la grande marche qui va commencer le 5 novembre. Ebranlé par les nouvelles défaites essuyées du 31 octobre au 5 novembre en Belgique, sur la Sambre, au Nord de l’Oise et entre Aisne et Meuse, l’ennemi est de tous les côtés débordé. C’est fini : ses positions sont brisées, entamées ou tournées ; l’Escaut franchi, la Sambre passée, l’Oise avec Guise saisie, la Serre menacée, l’Aisne supérieure entre nos mains, la Meuse bordée jusqu’à Wiseppe (Sud de Stenay), l’Hermann Stellung tournée à Valenciennes, brisée à Landrecies, l’Hunding Stellung prise de revers par la saisie de la boucle de l’Oise ; la Brunehilde rompue à Le Chesne, la Kriemhilde percée sur la rive gauche de la Meuse. L’Allemand n’a plus de points d’appui et l’on sait où en est, matériellement et moralement, son armée. Il s’en rend compte et, contraint par nos attaques victorieuses comme par ses nécessités personnelles de réduire son front, il est décidé au suprême repli qui, le 5 au matin, va commencer de toutes parts.

Sur un immense demi-cercle ininterrompu allant de la Meuse, au sud de Stenay, à l’Escaut, au Sud de Tournai, on va voir sept armées allemandes battre en retraite, abandonnant, les 5 et 6, une énorme portion de territoire et, se retirant, derrière des arrière-gardes impuissantes à nous arrêter, sur la région ardennaise. Sur leurs talons, neuf armées alliées se donnant la main, s’avancent vers le réduit où la bête traquée cherche son refuge. Mais déjà les armées de Castelnau, celle de Mangin, celle de Gérard prennent position pour sauter sur la bête qu’on sent sur ses fins.