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et la potasse continuait à venir totalement d’Allemagne (pour la plus grande part de Stassfurt, pour une faible fraction de Mulhouse) ; les financiers allemands jouaient même à tour de bras sur les affaires de potasse et venaient de provoquer ce qu’on appela « la crise du Kali, » quand la guerre éclata. Nous faillîmes alors manquer de la potasse indispensable pour nos industries, nécessaire pour transformer en nitrates de potasse les nitrates de soude du Chili destinés à nos explosifs. La logique eût commandé d’accélérer les recherches de Catalogne ; des raisons très complexes en amenèrent, au contraire, l’arrêt temporaire. Heureusement, il arriva alors ailleurs ce qui se produit toujours dans des cas semblables, quand une matière minérale fait défaut et quand on est disposé à la payer le prix nécessaire. On en découvre vite les quantités voulues et, souvent même, comme on a cherché avec une activité particulière, comme l’attention a été spécialement attirée sur cet effort, le prix de vente final est moins élevé qu’on ne l’aurait cru.

En ce qui concerne la potasse, on peut répéter ce que j’ai eu l’occasion de dire pour le fer, sur la répartition banale et courante d’une substance que je viens de signaler comme rare. La moyenne des roches éruptives quelconques en renferme près de 3 pour 100 et certains minéraux communs arrivent à 12 ou 15 pour 100. C’est même pour cela que la végétation a pu vivre si longtemps sans engrais potassiques, aux dépens du sol naturel, défoncé par la charrue et ameubli. Il a donc été possible de concevoir, et parfois d’installer des usines qui extrayaient la potasse de semblables minéraux triés. Mais on n’a même pas eu besoin, pour soutenir la guerre, de recourir à une extraction difficile. On a rencontré à temps quelques petits gisements utilisables, sinon comparables à ceux de Stassfurt et de Mulhouse : les uns aux États-Unis, dans le Death Valley californien et dans le Nebraska, qui ont produit une quinzaine de mille tonnes calculées en potasse, à un prix très élevé (environ huit fois le prix d’avant-guerre) ; les autres sur la Mer Rouge, aux confins de l’Erythrée italienne et de l’Abyssinie, On a eu recours aux ressources des eaux marines. Un peu de potasse allemande a sans doute aussi filtré jusqu’à nous. Et l’on a pu ainsi atteindre l’armistice, sans que les armées alliées aient manqué de ce corps indispensable.

Maintenant, la paix est signée et la potasse alsacienne est