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expliquent ce rapport 14/71, nous continuons à douter que les doctoresses et les avocates fournissent une statistique plus favorable.

Il est des carrières que l’avenir de la race interdit a fortiori aux femmes, ce sont celles où la dépense de force dépasse leurs ressources physiques : leur effort et leur lassitude feraient d’autres victimes qu’elles-mêmes. Ce ne sont pas seulement les carrières ouvrières ; et nous avons déjà vu les médecins, par exemple, prétendre, la statistique des décès prématurés et des carrières interrompues en main, que la pratique médicale courante est au-dessus des forces physiques de la femme. La pratique médicale courante, soit. Mais la femme ne pourrait-elle retrancher la faiblesse de son sexe dans la pratique de certaines spécialités ? Quoi qu’il en soit, si l’épuisement physique n’est pas le lot exclusif de l’ouvrière, il est bien son lot dans certaines tâches que la guerre lui a attribuées. Un chantre du labeur ouvrier, M. Hamp, reconnaît que c’est une rétrogradation de la société que l’emploi des femmes dans les travaux de peine. Il se console un peu vite en pensant qu’elles sauvent les débris de leur charme par une Heur posée sur la machine, ou par la chanson de l’équipe de nuit. Consolation insuffisante ; car ce n’est pas de charme seulement qu’il s’agit, mais de santé et de vie.

Et il serait douloureux et inquiétant de penser que cette rétrogradation, dont nous parlons, pourrait avoir un caractère définitif. A côté des intérêts économiques qui semblent exiger, dans la pénurie d’hommes, l’emploi des femmes, il y a des intérêts physiologiques qui les priment. Il faut à notre pays une hygiène, dans laquelle la race se retrempe et se refasse, après l’épreuve qui l’a privée de ses meilleures espérances, et ne lui rendra, dans la mesure même où elle la lui rendra, qu’une jeunesse usée. Mais c’est d’abord dans le corps des mères qu’il faut préparer la vigueur des fils. Et le premier danger serait d’ajouter à l’usure des hommes l’usure des femmes. Sait-on assez que le poids moyen des enfants nés à Paris diminue progressivement depuis cinq ans ? Là se sentent, quoique imprécises, les limites en deçà desquelles, maintenant qu’ont cessé les inexorables exigences de la guerre, le travail féminin devra rentrer. Une charte du travail des femmes, plus complète que ce qui existe jusqu’ici, devra être dressée. Ces