Page:Revue des Deux Mondes - 1919 - tome 54.djvu/133

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


VII

Un pessimisme excessif en ce qui concerne actuellement le péril allemand ne me semble pas fondé, mais l’excès contraire sérail une grave imprudence. Restons toujours défiants et vigilants à l’égard de nos ennemis. Cette vigilance, c’est chez eux seulement qu’elle peut s’exercer avec fruit. Pour l’instant, nos surveillants sont les membres des missions alliées qui contrôlent l’exécution du traité de paix. Laissez-moi souhaiter qu’il s’y ajoute bientôt par la reprise des relations officielles avec l’empire républicain la surveillance de nos diplomates et de nos consuls. Par les yeux de leurs agents les gouvernements verront mieux quelle importance il convient d’attribuer aux événements dont l’Allemagne en train de se transformer ne peut manquer d’être le théâtre et quelle influence ces événements auront sur le moral du peuple allemand.

La guerre, œuvre des empires germaniques, nous a fait brûler plusieurs étapes dans la solution des problèmes sociaux. En cinq ans, nous avons vieilli de cinquante, si je puis ainsi parler, et la société humaine sera lente à reprendre son équilibre compromis par les convulsions auxquelles elle a été en proie. Quels que soient le prolongement de ces secousses internes et l’intensité des problèmes que la paix a fait surgir, ne nous laissons pas absorber par les complications de l’heure critique où nous vivons et continuons de porter toute notre attention sur ce qui surviendra chez nos voisins d’outre-Rhin. Là est le secret de l’avenir. Veillons aussi à la reconstitution de nos forces industrielles, dussions-nous en emprunter quelques éléments et quelques modèles à l’Allemagne elle-même. Ne cessons pas enfin d’être unis pour la tenir en respect. Que les petites nations qui ont failli périr des coups dont elle les a frappées ne craignent pas de s’abriter sous l’alliance des plus grandes. Notre sécurité future, politique et économique, est à ce prix.


BEYENS.