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pût complètement remplir cette mission. L’Aisne fut franchie dès la fin de la matinée. L’attaque se poursuivait alors au Sud de la rivière et progressait, surtout au centre. Vers 19 h. 30, les plateaux de la rive gauche étaient déjà aux mains des Allemands et la Vesle atteinte par la 10e division de réserve dans la région de Bazoches, par la 5e division de la Garde dans celle de Bagneux. Entre la 22e division, droite du 11e corps, et les Anglais, le trou, creusé, s’agrandit : les Allemands n’ont plus devant eux, à part quelques éléments épars des divisions bousculées, que les autos-canons et les autos-mitrailleuses du 1er corps de cavalerie accourus de Ville-Savoie et de Mont-Saint-Martin.

La nuit arrêta à peine la poursuite : dès l’aube, elle reprenait. Dans la nuit, une division allemande (10e de réserve) avait franchi la Vesle à 1 heure et déjà marchait sur les bois de Dôle en direction de Fère-en-Tardenois ; débordant Fismes par l’Est, une autre, la 5e de la Garde, marche sur Courville en direction de Ville-en-Tardenois ; à 11 heures, les défenseurs de Fismes, attaqués et débordés, se replient. A l’Est, la progression est plus lente ; mais après de violents combats, au Sud de Lœuilly et dans la région de Sancy-Vrégny, la Vesle est atteinte, à 10 heures, dans la région de Vasseny.

La Vesle avait déjà été franchie à midi à l’Ouest de Breuil, et déjà le massif de Saint-Thierry est menacé. A l’Ouest Crouy est forcé, les Allemands pénètrent dans Soissons où la lutte de rues dure toute la nuit. A la fin de cette deuxième journée le front était, de l’Est à l’Ouest, jalonné par Lueuilly.Terny-Sorny, Venizel où la poche se creusait énorme déjà par Cuiry-House, Chery-Chartreuse, Mont-sous-Courville, Crugny. Braucourt, pour remonter un peu vers le Nord de la Vesle par Chenay Pouillon, Thil et Courcy.


Cette soirée du 28 mai 1918 restera historique. Plus on connaîtra ce qui se passa au Grand Quartier allemand et plus, sans doute, on y verra un de ces moments où se joue le destin.

La nouvelle de la brusque irruption de l’armée allemande dans nos lignes de l’Aisne faisait frémir, — on peut l’écrire sans aucune exagération, — le monde entier. Sans doute avait-on