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entoure le grain, il constata que les animaux étaient bientôt atteints d’une polynévrite identique à celle du béribéri humain. La valeur alimentaire, la valeur énergétique, dynamogène du son de riz est très faible ; il suffit cependant d’en ajouter très peu à la ration de riz glacé des oiseaux pour que ceux-ci soient rapidement guéris.

Comme le fait remarquer M. Schaeffer au cours d’une remarquable élude de la question à laquelle j’ai beaucoup emprunté et qui a paru naguère dans le Bulletin de l’Institut Pa^^ewr, la découverte d’Eykman est due à cette heureuse circonstance fortuite que, dans le riz, les vitamines sont localisées dans la pellicule externe du grain.

Cette reproduction expérimentale du béribéri était d’une importance théorique et pratique extrême. On sait que cette maladie fait des ravages énormes en Extrême-Orient oti il tue les gens par milliers. On l’a signalée aussi depuis la guerre en Mésopotamie, au front italien, et même en France. Depuis ces recherches, le remède en est tout trouvé, et on a notamment jugulé des épidémies graves de béribéri, dans la marine japonaise, en substituant au riz l’orge dans l’alimentation et surtout en y ajoutant de la viande fraîche. L’emploi du riz non décortiqué donne le même résultat.

Le cortex du grain de riz contient donc une substance qui est un véritable contrepoison du béribéri, ou, pour mieux dire, et, avec une imprécision peut-être plus exacte, une substance antibéribérique. Le béribéri, comme toute autre maladie par carence, est-il dû en effet à une action nocive, et, si j’ose dire, active des substances privées de vitamines, action nocive que ces dernières contrebalanceraient ? Est-il dû au contraire véritablement et uniquement à un manque de ces vitamines ? Ce sont là des questions qui touchent peut-être un peu trop à la métaphysique du problème pour être abordées avec chance de succès. Le côté purement physique et expérimental de la question est d’un intérêt suffisant pour que nous nous y bornions.

Quoi qu’il en soit, on s’est naturellement préoccupé de rechercher, d’isoler, la substance active contenue dans le cuticule des grains de riz. Successivement Fraser et Stanton, puis Susuki, Schimamura et Odaké, puis Funk, tirèrent de cette cuticule par divers procédés chimiques des extraits de plus en plus actifs de cette substance que Funk appela Vitamine et dont il donna la formule chimique. Cette formule n’a pas été confirmée, mais le nom est resté. Quoi qu’il en soit, de 100 kilogrammes de son de riz, Funk extrayait 2 gr 5 seulement de cette substance dont le pouvoir antibéribérique est très puissant. On peut juger par là qu’il suffit d’une quantité infime de ce corps