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conféré sur le premier objet avec Haig, il courait, le même jour, à Noailles, quartier général de l’infatigable Fayolle qui, tout en abandonnant momentanément sa 1re armée au maréchal anglais, ne se pouvait désintéresser de la bataille ; tandis que Debeney déborderait Montdidier par le Nord, le 35e corps s’engagerait au Sud en vue d’achever l’encerclement ; puis, par son 34e corps, la 3e armée (Humbert) attaquerait, le moment venu, sur le flanc droit de l’ennemi repoussé, en direction générale de Lassigny. L’attaque de Haig étant fixée au 8, le 35e corps attaquerait dans l’après-midi du 9, la 3e armée le 10. Quant à la 10e armée (Mangin), elle était alertée, car elle devait suivre par sa gauche, au sud de l’Oise, les progrès de la 3e armée : appuyée à l’Oise, elle pourrait sans inquiétude viser la route de Chauny à Soissons comme premier objectif. Ainsi se lierait la bataille d’hier avec la bataille de demain. A tout instant, dans l’esprit de Foch, une attaque à la veille de se déclencher devait prendre éventuellement toute l’extension susceptible de transformer un large succès local en une victoire plus large encore.

Que l’Allemand fut tout à fait sans méfiance, on ne le peut croire. L’opération de Montdidier, — saillant assez aventuré, — lui paraissait supposable. Le 23 juillet, Debeney avait, par une brillante attaque sur le front Mailly-Raineval-Nord de Grivesnes, assuré sa base de départ ; les Allemands eux-mêmes avaient, le 27 juillet, abandonné la rive droite de l’Avre et, le 3 août, leurs premières lignes au Nord de Montdidier ; Debeney avait alors bordé la rive gauche de l’Avre et du ruisseau des Trois Doms. En réalité, l’ennemi parait avoir tout au plus redouté un coup de main sur Montdidier : une grande offensive de la Somme à l’Oise lui paraissait invraisemblable de la part des armées alliées, dont l’une, la française, était tenue par lui pour momentanément épuisée par l’âpre bataille de juillet, dont l’autre, l’anglaise, allait s’absorber, à son avis, dans une offensive sur la Lys. Le canon de Rawlinson, le premier, dissiperait ces illusions.


Le 8 août, en effet, à 4 heures, l’artillerie britannique ouvrit un feu intense sur le front d’attaque que l’on sait (du Sud de la Somme au Nord de la route d’Amiens à Roye) et, presque aussitôt, l’infanterie et les tanks de Rawlinson s’élancèrent.