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volontiers des prérogatives honorifiques de sa fonction en Allemagne ; puis, les volontés d’en haut sont, la plupart du temps, devinées et exécutées avant d’avoir été exprimées. En France, les choses pourraient prendre une tournure moins pacifique, et il faudrait des textes bien ingénieux pour régler les rapports de l’État et de l’Université. Est-ce le moment de les improviser ? Faut-il tenter cette expérience à Strasbourg où de tels conflits seraient particulièrement dangereux ? Les Allemands y sont en situation d’exploiter tout ce qui peut troubler l’esprit public. D’ailleurs, il n’est pas vrai, comme certains le prétendent, que notre loi mette le Conseil à la merci du recteur. Celui-ci, après tout, n’a qu’une voix dans les délibérations, et l’on a vu, plus d’une fois, nos Universités repousser des projets que leurs recteurs voulaient leur imposer.

La plus sage est donc d’appliquer à Strasbourg la loi française. Si elle est libéralement interprétée, selon l’esprit de ses auteurs, elle ne peut ni gêner l’essor, ni menacer l’indépendance de l’Université.


Les professeurs. — Leur choix et leur nombre importent plus que le texte du statut ; une Université dont la valeur scientifique sera solidement établie ne sera jamais en peine de défendre ses privilèges devant l’opinion publique.

Dès maintenant, il est décidé que toutes les matières étudiées dans l’Université d’hier le seront également dans celle de demain. A la réouverture des cours, environ cent soixante-dix professeurs et maîtres de conférences seront répartis dans les six Facultés. Des instituts nouveaux seront créés, plus tard : en ce moment, le personnel de l’enseignement supérieur se trouve très réduit ; beaucoup de jeunes professeurs sont tombés sur les champs de bataille ; pendant cinq ans, les concours pour l’agrégation de droit et de médecine ont été suspendus. Le nombre des étudiants, qu’on ne connaît pas encore, influera aussi sur le nombre des chaires. Il serait périlleux d’organiser des enseignements avant d’être certain qu’ils ont chance de réussir à Strasbourg.

Il va de soi que les maîtres seront pris dans l’élite scientifique de la France. On ne les attirera que si l’on peut leur offrir des traitements considérables, mais cela touche aux ressources de l’Université.

On s’était demandé s’il convenait de conserver la Faculté de