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Déjà, des relations existent entre ces usines et Strasbourg, qui est d’un autre côté en communication avec la Sarre par le canal de Sarrebrück. Mais doit on pousser la canalisation de la Moselle jusqu’au Rhin ? La réponse à cette question est beaucoup plus délicate : on peut se demander en effet s’il est opportun de dériver sur les provinces rhénanes le minerai et l’acier produits par notre bassin de Lorraine, ou s’il ne vaut pas mieux réserver nos expéditions à Strasbourg et au reste de la France. Pour moi, qui suis un partisan convaincu de l’amélioration des conditions de transports fluviaux, j’estime que nous trouverions des avantages à établir des relations directes par la Moselle entre notre bassin minier et l’Angleterre, qui pourrait nous envoyer du coke. Nous cesserions ainsi d’être tributaires du bassin de la Ruhr pour ce produit qui est indispensable à la production de la fonte d’acier. De récents événements viennent de nous prouver que nous ne pouvons guère compter sur nos ennemis pour assurer une régularité suffisante aux expéditions de coke de Westphalie vers nos hauts-fourneaux : les Allemands, qui devraient nous expédier 11 000 tonnes de coke par jour, formant 22 trains, ne nous envoient que le tiers de ce chiffre.

Quant à la canalisation de la Moselle, il y a fort longtemps qu’elle a été étudiée, puisque, dès 1769, la Société royale des Arts et des Sciences à Metz avait mis cette question au concours ; depuis 1815. la Chambre de commerce de Metz n’a cessé de piailler la cause de la canalisation de la Moselle jusqu’au Rhin. Dernièrement encore M. Houpert, membre de l’honorable assemblée, exposait comment la libre navigation jusqu’à Coblentz affranchirait du joug allemand notre industrie métallurgique. Il formulait l’espoir que l’on reçût d’Angleterre, non pas du coke, mais de la houille, pour la transformer sur place en récupérant des sous-produits indispensables à nos industries chimiques ; il demandait enfin que nos armateurs et nos grandes sociétés industrielles créassent en commun de grandes Compagnies de navigation fluviale analogues à celles qu’avaient fondées les sociétés westphaliennes En 1912, la Moselle a donné accès à 429 bateaux portant 114 000 tonnes ; si elle était mise en relations avec les bassins de la Sarre et de la Lorraine par le Luxembourg, il est incontestable qu’elle prendrait une grande importance.

De toute façon, sachons redonner de la vie aux canaux de la