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objectifs. A notre droite, la garnison de Mont-Renaud (sud-ouest de Noyon), — violemment assaillie, — ne se replia sur son soutien que vers 10 heures, et le Plémont (sud de Lassigny), non moins violemment attaqué, tint jusqu’à midi. A notre gauche, Courcelles, âprement disputé, resta entre nos mains. Mais, au centre, la première ligne ayant été emportée par trois divisions allemandes d’assaut, appuyées par un tir violent d’artillerie et quelques tanks, l’ennemi dépassa même notre seconde ligne que sa garnison n’avait pu occuper à temps complètement, et l’ennemi put ainsi s’enfoncer jusqu’à Ressons-sur-Matz, qui, en fin de journée, restait entre ses mains ; la ligne passait, ce soir-là, par le Fretoy, Courcelles, Méry, Belloy, Saint-Maur, Marquéglise, Vaudelincourt, Elincourt, le Sud de l’Ecouvillon, Orval et Ville. La poche créée avait au maximum 9 kilomètres de profondeur ; en apparence, la violence de l’attaque avait eu raison de nos procédés de parade. En réalité, notre front, s’il s’était incurvé, ne s’était nulle part rompu. On avait donc l’impression que, cette première journée ayant été assurément moins heureuse qu’on ne s’y pouvait attendre, nos troupes cependant n’étaient nulle part bousculées ni même ébranlées. Notre ligne en effet se reformait sans désordre et nulle inquiétude sérieuse n’était à concevoir.

Hutier cependant entendait profiter de l’avance de Ressons-sur-Matz pour pousser sa pointe vers Gournay-sur-Aronde. A son centre, il jeta, le 10, sur la Ferme-Porte, une de ses divisions de réserve, fortement appuyée par les éléments engagés la veille. A l’aile gauche, il renforçait sa 11e division, arrêtée devant l’Ecouvillon-Attichy, avec mission d’atteindre le Matz, pendant qu’à l’aile droite, la 30e division, également réservée le 9, réattaquerait la ligne Courcelles-Méry.

La lutte fut très chaude toute la journée : au centre, l’ennemi enleva la Ferme-Porte et put prendre pied dans Antheuil ; il arriva sur l’Aronde, mais une réaction de nos troupes le ramena aussitôt jusqu’à la Ferme-Porte, qui finalement nous resta. A notre gauche, Courcelles tenait bon et Méry retombait en notre pouvoir ; la poche se creusait donc sans s’élargir, et le commandement français allait exploiter cette situation sans tarder. A notre droite, il est vrai, nous étions forcés de nous replier derrière l’Oise et le Matz : l’ennemi déjà s’insinuait