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tantôt, chez l’autre, et nous avons eu de ces tête-à-tête un tableau charmant, que nous ne reproduirons pas, voulant éviter tout ce qui, mal interprété, ressemblerait d’aussi loin que ce soit à une pointe d’ironie. On attendait de cette absence de solennité, de cette espèce de familiarité, un résultat plus prompt, avec un travail moins difficile. D’autant plus qu’un second changement concernait le fond. On avait songé jusqu’alors à examiner chaque problème séparément, et à prendre une décision immédiate à propos de chaque problème examiné. « A la suite des observations présentées, il paraît avoir été résolu de subordonner l’examen des détails à celui de l’ensemble. » (Ce procédé intellectuel laisse le logicien rêveur.) Mais le communiqué reprend : « Chacun des chefs de gouvernement soumettra en quelque sorte un ou plusieurs projets de traité complet, comprenant toutes les clauses territoriales et financières qui devront y figurer en dernier ressort, et c’est sur l’ensemble de chacun de ces projets que portera la délibération. On parait croire que cette méthode permettra d’examiner les problèmes dans un esprit plus large et l’on semble espérer qu’il sera possible de mettre sur pied un projet commun dans l’espace de quelques jours. » Rien ne troublera la méditation sereine et profonde des Quatre. « Il parait être dans l’intention des divers gouvernements de restreindre, pendant toute la durée de ces délibérations, les communications faites à la presse. » La vieille prudence diplomatique, qui n’est, pour une part, qu’une juste modestie, se reconnaît, en outre, à l’emploi abondant des : « On paraît croire... » « On semble espérer... « « Il paraît être dans l’intention. » Au surplus, tout ce qu’on paraît croire, tout ce qu’on semble espérer, tout ce qui paraît être dans l’intention, est excellent : après l’avoir tardivement conçu, il reste à le réaliser rapidement.

Tantôt chez l’un, tantôt chez l’autre, parfois chez le même, matin et soir, les Quatre se réunissent. Premièrement, le protocole le veut, chez M. le Président Wilson. Le lendemain, le Daily Mail nous confie : « Je crois savoir... (Quand les hommes d’Etat paraissent croire, il est naturel que les journalistes croient savoir.) Je crois savoir que le Conseil des Quatre s’est occupé hier de la question des réparations. Il résulte d’informations recueillies dans la soirée qu’il est possible que les traités de paix avec l’Autriche, la Bulgarie et la Turquie soient signés en même temps que le traité de paix avec l’Allemagne. Cette procédure reculerait sans doute la signature de la paix au 1er mai, mais on se trouverait alors en présence d’un traité définitif. » Par là, une manière de question préjudicielle est posée. Y aura-t-il un traité, ou y