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Et le cliquetis des armes,
Et l’éclair des coups de feu
Alternaient avec les larmes
Et les cris jetés vers Dieu
Comme les répons d’un psaume.
Qu’importait au mauvais temps
Qui dispersait les royaumes
Le sort des fils de vingt ans ?
Qu’importait à la tempête
L’espoir placé sur la tête
D’un jeune héros rieur ?

Cible pour les artilleurs,
Feuille pour les balayeurs !



Le mal profond poussait dans la croûte terrestre
Ses fibres toujours plus avant.
De la plaine il gagnait la solitude alpestre
Mais les villes surtout comme un immense orchestre
Gémissaient dans le vent.

La mort à tour de bras y battait la mesure.

Les journaux annonçaient à quel degré d’usure
Chaque peuple était parvenu.
Les diamants brillaient derrière les vitrines
Mais l’âtre était sans feu, la houille et les farines
Atteignaient un prix inconnu.

Les uns s’enrichissaient des misères publiques
A.es autres sanglotaient sur de pauvres reliques.

Les femmes avaient pris la blouse ou le sarrau,
Une haleine puissante ébranlait le carreau :
L’obus tombait par intervalles.

Et la guerre avait deux rivales
Qui marchaient d’un pas plus caché :