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LA MAINMISE DE L’ÉTAT
SUR
LA FLOTTE MARCHANDE

Nul ne saurait contester à un État belligérant la faculté de réquisitionner, dans l’intérêt de la Défense nationale, les biens de ses sujets. Le droit de réquisition est de tous les temps et de tous les pays ; il est vrai seulement qu’autrefois, il ne dépassait pas la portée d’un mousquet : il était en quelque sorte l’apanage de l’armée en campagne. Comme il était juste, la notion du recensement de toutes les richesses de la patrie, en vue de leur exploitation méthodique, pendant la guerre s’est fait jour dans nos lois. Parmi ces richesses, la flotte marchande, prolongement de nos chemins de fer, est une des plus précieuses. Les navires sont donc au nombre des choses dont peut s’emparer la puissance publique.

Le droit de réquisition est entouré de garanties qui précisent le caractère de cette mesure exceptionnelle. La loi du 3 juillet 1877 spécifie que la réquisition n’est exercée qu’en cas de mobilisation, et pour les besoins de l’armée ou de la marine, afin, dit l’article premier, « de suppléer à l’insuffisance des moyens ordinaires d’approvisionnement. » Les prestations effectuées donnent droit à des indemnités représentatives de leur valeur. L’article 5 de la loi, qui parle de la réquisition des navires, indique que le ministère de la Marine peut en tous temps et en tous lieux réquisitionner les navires de commerce et embarcations de toute nature. Il résulte de ce texte que la réquisition, prévue par la loi de 1877, ne vise que les prestations nécessitées par un intérêt militaire. : Dans l’esprit du législateur, elle a même pour but de suppléer à la pénurie) de ressources ordinaires, de l’Intendance ; elle est donc forcément