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France ! — La section avance toujours avec un entrain endiablé. J’ai l’impression que nous allons trop vile. A ma gauche, la Section Grisez fait de même. Des obus éclatent nombreux, à 150 mètres derrière nous. Je m’aperçois que nous avons dépassé notre tir de barrage. Heureusement, un artilleur est là : il lance une fusée et le tir s’allonge. Nous avons maintenant le Plessis en arrière et à droite, Lassigny à quelques centaines de moires devant nous. Il est vraiment dommage que ce dernier village ne soit pas notre objectif, car nous en sommes très près et nous le prendrions sans coup férir. Les Boches ont dû l’évacuer, car aucune balle n’est tirée sur nous... »

Nos hommes auraient couru jusqu’à Lassigny. Cependant les tranchées en avant et à l’Ouest du village étaient garnies, et la section du sergent-major Delavaud, à la gauche de la section de ce jeune aspirant Leniand qui conte aussi bien qu’il se bat. dut réduire quelques nids de mitrailleuses et perdit trois blessés. Le tireur Pinson, de la patrouille de combat, se porta bravement de leur côté avec son fusil-mitrailleur et par son tir en marchant fit terrer les servants, qui bientôt se rendirent. Trois mitrailleuses restèrent ainsi entre nos mains. Une fois le terrain conquis et nettoyé aux abords de la route, restait à opérer cette hardie conversion à droite qui devait envelopper le village, le château et le parc.

Mais la compagnie Gossard du 236e n’a pu remplir aussi brillamment sa mission. Chacun, au combat, court sa chance, et ce ne sont pas toujours les triomphateurs qui ont déployé le plus de courage et d’endurance. La fortune favorise les audacieux, mais ses faveurs sont fort inégales. La compagnie Gossard est donc pallie avec l’entrain communicatif des marsouins. Elle n’accomplira pas un aussi long trajet. Apres avoir suivi le vallon du Pré de Vienne où elle est abritée, la voici qui atteint la route. Comme elle est à la droite du dispositif, l’ennemi, retranché dans le parc, et qui en surveille les abords, l’aperçoit qui dépasse la crête. Elle est clouée sur place par le feu des mitrailleuses tirant du mur Nord-Ouest du parc et, faisant face à l’Est, devra se borner à ouvrir le feu à son tour contre les défenseurs du Plessis, couvrant ainsi à droite le petit corps expéditionnaire qui, réduit à deux compagnies, continue sa marche foudroyante.

Un quart d’heure après le départ, le corps Reboul a donc la