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travers les rêves d’espérance et de triomphe. La foi religieuse le soutient : ceux de ses camarades qu’elle ne réconforte pas à ce degré, chez qui ne se retrouve pas la même élévation intérieure, sont à la merci du premier échue ou d’un jeûne trop persistant ; alors ils ne songeront plus qu’à leurs amours, à leur terre natale, à leur misère, et ils s’attendriront sur eux-mêmes avec une délectation qui augmentera leur faiblesse. Lui-même saura bien mourir : on ne discerne pas en lui la volonté de vaincre. Type exceptionnel et intéressant d’une jeunesse cultivée, mais aussi d’une Allemagne toujours prête aux développements poétiques et qui se serait si bien accommodée, tout en se pâmant sur les beautés de la nature et la douceur des foyers, de dévaster nos campagnes et d’emmener nos filles et nos fils en captivité.

« La 7e division de réserve, disent les ordres signés du général comte von Schwerin, attaquera l’ennemi le 30 mars, de part et d’autre de Lassigny et le rejettera au delà du chemin de fer Compiègne-Roye. L’attaque sera poussée si possible au delà de cet objectif. Les 66e et 72e régiments attaqueront en première ligne sous le commandement de la lie brigade d’infanterie de réserve. » Pousser en avant, sans arrêt, « durchbrechen so weit es kann » : telle est la mission donnée. Il s’agit de rompre le front français.

Les trois régiments se sont abrités dans les anciennes tranchées allemandes d’avant le retrait de mars 1917. Ils sont, selon les ordres, ainsi disposés, face au Plessis-de-Roye et aux pentes Nord-Ouest du Piémont : deux régiments en première ligue, le 66e à l’Ouest et le 72e à l’Est, un régiment en soutien, le 306e ; dans chaque régiment, deux bataillons en première ligne, un bataillon en réserve. À la droite de la 7e division, doit attaquer la 5e division d’infanterie de la Garde, sur les hauteurs de Biermont et d’Orvillers, son aile gauche s’avançant le long de la route Roye-sur Matz-la-Berlière Ricquebourg. Un certain intervalle séparera donc les deux régiments voisins (le 66e de la 7e division, et le régiment Elisabeth. 3e régiment de grenadiers de la Garde, de la 5e division de la Garde) dans leur marche d’assaut : ils ne se rejoindront qu’à Bayencourt, au delà de Gury. Cet intervalle sera tenu constamment sous le feu, de l’artillerie. Le 66e régiment devra donc, au cours de l’attaque, tendre vers la droite pour y chercher et trouver sa