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point de vue pratique de la productivité de l’impôt, ni surtout celui qui est ici dominant, le point de vue économique.

Le problème actuel n’est pas en effet purement fiscal ou financier, il est avant tout un problème économique, le plus crave qu’une nation ait jamais eu à résoudre. S’il y a une vérité évidente, c’est que la source de l’impôt n’est autre que la puissance productive du pays. Directement ou indirectement, c’est le revenu national, — profits et rente, intérêts et salaires, — qui paie l’impôt, et si l’impôt vient un jour à prendre sur le capital, c’est un appauvrissement d’autant pour la nation. Comment un revenu national stationnaire supporterait-il un impôt double ou triple ? L’impôt accru ne sera normalement payé que pur un revenu net accru, par une production supérieure et une épargne majorée. Développer la production, telle est donc la condition première du relèvement financier. Le problème fiscal se résoudra par la régénération industrielle et commerciale, par l’augmentation de la richesse. « Enrichissez-vous, » disait Guizot à la bourgeoisie de Louis-Philippe, pour la détourner, dit-on, de la politique en la jetant au pied du veau d’or. Bien différent certes, encore que le rapprochement vienne de lui-même, est le langage de notre ministre des Finances, qui promettait naguère à la Chambre de « chercher et trouver les moyens de développer la fortune nationale, » et ajoutait que « tout l’art du ministre de demain serait de demander au contribuable un effort supplémentaire en lui permettant de gagner davantage. » Produisez plus, économisez plus, afin que le fisc vous prenne plus ! Amère ironie, ou cruel paradoxe ? Non : évidente vérité. Pour accroître l’impôt, il faut accroître la matière imposable, favoriser la mise en valeur de toutes les ressources et l’exploitation intensive de toutes les richesses du pays. Et ce qu’on doit d’abord demander à l’Etat, c’est de ne pas décourager l’épargne et la formation des capitaux, de ne pas entraver par l’impôt l’action de l’initiative privée dans le développement de la production nationale.

Les socialistes ont au problème fiscal leur réponse toute prête. Ils veulent du neuf, en fait d’impôts comme en tout : les radicaux d’après 1870 ne parlaient pas autrement. Plus d’impôts indirects, plus d’impôts de consommation, injustes et antidémocratiques. Pourquoi aller rechercher dans les fonds de tiroirs des vieux économistes une vieille poussière de petites