Page:Revue des Deux Mondes - 1918 - tome 47.djvu/897

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

songeaient-ils, une part de ces ovations s’adresse justement aux marines alliées, car c’est grâce à elles que ces valeureuses légions purent franchir l’Atlantique dans des conditions de sécurité inespérée. Instruits par l’exemple de la « méprisable petite armée du général French, » les Allemands n’ont pas voulu douter de la valeur de nos nouveaux frères d’armes, mais ils avaient affirmé que ceux-ci ne passeraient pas… Ils ont passé… Ils sont là ! » Or, voici qu’un avion de chasse survient de l’Occident et plane au-dessus des Américains : ils lèvent les yeux, ils reconnaissent l’oiseau de France qui les accueillit en vue de la terre d’Europe et dont l’aile tutélaire protégea la route hasardeuse de leur vaisseau. Alors c’est à ces marins qui mènent la rude vie du large, c’est à ces héros obscurs que vont toutes mes pensées. Les soldats qui luttent sur la ligne de feu ont la consolation de penser que leurs sacrifices sont connus de tous et sanctifiés par d’unanimes prières. La vie de nos matelots est comme entourée de mystère ; leurs actions d’éclat sont sans témoins, dans le vide infini de l’Océan. La plume du reporter ne les accompagne point dans leurs patientes et ingrates croisières. J’ai voulu soulever un coin du voile qui les cachait à l’admiration du pays.

Dernièrement, le Président de la République, au cours d’un voyage fait à Brest, à Camaret, à Toulbroch et la pointe Saint-Mathieu, cette sentinelle avancée du front de mer, constatait l’incessant labeur de l’arsenal, dans l’organisation des convois, dans la recherche et la poursuite des sous-marins ennemis, dans le développement des écoles d’écoute, dans l’utilisation des ballons captifs, des dirigeables, des hydravions, des avisos, des torpilleurs, etc, M. Poincaré adressait le 1er août au ministre de la Marine une lettre où l’on relève le passage suivant : « Je souhaite que mes félicitations si hautement méritées par ceux que j’ai vus, atteignent au loin ceux que je n’ai pu voir et qui, sur toutes les mers, se dévouent silencieusement à la France. La France ne les oublie pas. Elle sait qu’en assurant, pendant la longue durée des hostilités, nos communications maritimes avec nos alliés, ils auront, eux aussi, comme leurs camarades de l’armée de terre, héroïquement contribué à la victoire. »

Quel plus bel hommage pourrait-on rendre à nos marins ?

Quant à l’Allemagne, ainsi que le proclamait notre Président du Conseil, « dans l’abîme d’une défaite irréparable, elle