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fort peu que vous fassiez couvrir les marges de réflexions, de dénégations et de renonciations. Je suis peut-être le seul de vos rédacteurs qui ne vous ait pas rendu solidaire de ses inimitiés, et il est vrai de dire qu’en fait de personnes, je n’en ai point. Je n’ai aucune rancune contre M. Sainte-Beuve, et vous approuve de lui rendre hommage. Vous pourriez lui faire des madrigaux sans me chagriner. Au reste, votre remarque était, je crois, inutile : je n’attaquais point le talent, ni la gravité habituelle du talent de M. Sainte-Beuve. Je disais seulement que son article sur M. de Lamennais était un jeu d’esprit, et je persiste à le croire, et j’aurais le droit de le dire, M. Sainte-Beuve fût-il mon ami, comme il l’a été autrefois. Il faudrait que M. Sainte-Beuve fût bien olympien pour qu’on n’eût pas la liberté de lui dire qu’il ne parle pas toujours sérieusement. Je crois qu’il sera moins susceptible que vous, et qu’il n’en dira ni plus ni moins de mal de moi qu’à l’ordinaire. D’ailleurs, il m’a conseillé une fois de parler plus respectueusement de Mme de Staël ; je n’ai pas trouvé cela mauvais, mais je peux bien, moi, lui conseiller de parler plus sérieusement de M. de Lamennais. M. de Lamennais vaut bien Mme de Staël, et je ne vois pas le droit que Sainte-Beuve a de juger les autres sans être jugé à son tour. Au reste, ne vous désespérez pas, ne vous arrachez pas les cheveux, cher Buloz, je ne dirai et n’écrirai jamais de Sainte-Beuve plus qu’il n’y a dans cet article, vu que c’est la seule lâcheté littéraire qu’il ait commise, et je pense que ce sera la dernière. Il l’a senti en se conduisant comme il l’a fait depuis à l’égard des Guizot, de Broglie, croix d’honneur, etc. Laissez M. Lerminier me répondre s’il le veut, je lui re répondrai. Je ne suis nullement inquiète de son ton avec moi, sûre que je suis de ne jamais l’autoriser à manquer de convenance dans la discussion… J’ai prié Planche de me renvoyer Spiridion, j’avais des changements à y faire, je l’ai reçu et vous l’aurez incessamment…

« Mon pauvre Maurice est bien souffrant, et il m’est impossible de le faire voyager. Je vous parlerai de mes projets quand il sera mieux, et que je pourrai fixer quelque chose. Si vous étiez joli, joli, vous me feriez cadeau des œuvres de Devigny (sic). Si Planche pouvait me faire donner par Huet un exemplaire des Sources de Royat, j’en serais très reconnaissante, et ce serait une bonne chose à mettre sous les yeux de Maurice,