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stratégique. Le grand port de la Dwina est tout à fait excentrique par rapport à l’axe du nouveau théâtre, à la ligne d’opérations essentielle qui est le chemin de fer de Kola. Qu’on ne l’abandonne pas avant l’hiver venu avec son blocus naturel de glaces soudées, cela peut se défendre, ne fût-ce que pour avoir le temps d’évacuer les munitions, armes, engins, matériel de guerre et matières de toute sorte qui y furent accumulées jusqu’au dernier moment, peut-être jusqu’à la dernière révolution maximaliste. Mais il ne saurait être question, semble-t-il, de s’y établir à demeure, au risque de scinder en deux l’expédition.

Si l’on opposait à ceci l’intérêt d’empêcher les Allemands, — d’accord avec le gouvernement bolchevik, — d’y organiser précisément, pour l’été de 1919, la base de sous-marins qu’ils recherchent, je répondrais qu’Arkhangelsk serait, à cet égard, bien mal choisi, étant très facile à bloquer avec une force navale légère quand il n’est plus fermé par la banquise, et que les fonds du delta de la Dwina se prêtent complaisamment à l’organisation des barrages de toute espèce, obstructions, pannes flottantes, filets métalliques et mines automatiques.

Dans le cas, par conséquent, — cas peu probable, en raison de la tournure des événements, — où l’état-major allemand s’aventurerait à faire occuper Arkhangelsk, position encore plus excentrique pour son propre dispositif stratégique qu’elle ne le serait pour nous, placés sur la côte mourmane, il nous serait aisé de « masquer » cette place maritime d’importance transitoire et d’y boucher aux sous-marins toutes les portes de la haute mer.

Serait-ce un deuxième écueil que de s’écarter un peu sur la droite, — r face au Sud, — de la ligne d’opérations tracée par la voie ferrée Kola-Kem-Petrograd et de tenir ce que l’on appelait autrefois « un corps d’observation, » ce que j’appellerai dans ce cas « un corps de liaison éventuelle, » sur un point bien choisi du Lappland, à la fois couvrant les districts miniers de la Norvège et contenant les éléments Finno-Lapons voisins de la Tornéa qui seraient tentés de provoquer de l’agitation chez leurs congénères d’au-delà de la frontière suédoise, faisant ainsi le jeu de l’Allemagne ?

Évidemment non. Et si, acceptant cette idée, on se demandait quel serait le meilleur point à choisir, il semble bien que