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a produit une véritable révolution. Dans le haut fourneau moderne, on s’attache à recueillir complètement les gaz sortant du gueulard, soit pour chauffer l’air qui doit être soufflé dans le haut fourneau lui-même sur le lit de fusion ou dans des cornues Bessemer associées, soit pour produire la vapeur d’autres machines. Ailleurs, on utilise des combustibles inférieurs dans des appareils où ils en remplacent de plus précieux ! J’ai déjà cité à ce propos le développement pris depuis la guerre par l’industrie des lignites et des tourbes. On arrive même à reprendre, pour les laver et les utiliser, les déblais des mines de houille…

L’application rationnelle des combustibles comporte des problèmes d’un autre genre : par exemple, savoir si l’on doit transporter le charbon lui-même, ou transporter la force produite dans les gazogènes d’une centrale électrique au moyen de ce charbon. La seconde solution gagne chaque jour du terrain et tend même, en Angleterre comme en Allemagne, vers de larges projets de centralisation étatiste. L’électricité a un grand avantage : c’est qu’en tournant un commutateur, on arrête sa consommation, tandis qu’une machine, alimentée sur place par une chaudière, dépend de celle-ci. La centrale, menée plus industriellement, peut en outre utiliser des combustibles plus médiocres et obtenir des sous-produits. En revanche, il existe quelques inconvénients secondaires : centralisation excessive de l’énergie exposant à un arrêt général en cas d’accident, frais d’installation, perte dans le trajet et nécessité d’une organisation méthodique pour remédier à l’arrêt simultané de nombreux consommateurs. Tout compte fait, la dépense de charbon par cheval-heure peut être souvent réduite à la moitié, quelquefois au tiers, par substitution de centrales aux moteurs particuliers. L’avantage, qui existe pour la houille, s’accuse encore davantage pour les forces hydrauliques. Etant donnés les prix élevés que l’on peut prévoir pour les charbons dans l’après-guerre, il sera tout indiqué qu’une grande partie de la houille blanche actuellement employée à des industries de guerre ou à de l’électro-métallurgie cherche un débouché dans la consommation courante à grande distance : dans les petits ateliers, les maisons, et même, malgré les difficultés pratiques, dans les fermes.