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savoir qu’il était disposé à attaquer en liaison avec la Ge armée, mais seulement si l’offensive était générale. C’eût été recommencer la grande bataille et telle chose n’était pas, on le sait, dans les idées de Joffre.

Maunoury se maintint néanmoins dans sa résolution : Vautier attaquerait sur Nampcel et Vingré, Ebener sur Moulin-sous-Touvent, Puiseleine, Tracy-le-Val, Lamaze sur les collines au Nord de Soissons. Ce furent, les 23 et 24, dans la boue et le brouillard, d’âpres assauts. Quelques succès (sur Tracy-le-Val et le bois Saint-Mard) démontraient une fois de plus l’opiniâtre héroïsme de nos troupes, mais, presque partout, elles furent arrêtées devant l’objectif principal. A droite, les Anglais, qui avaient promis d’attaquer sur le plateau de Vregny pour appuyer Lamaze, ne purent sortir de leurs tranchées. Non seulement, le 3e corps anglais ne bougea pas, mais, à sa droite le Maréchal attendit, pour actionner le 1er corps Haig sur les bois à l’Ouest d’Aillés, que le 18e corps « eût progressé suffisamment. »

D’Esperey avait en effet tenté, de son côté, sinon un assaut général, du moins une avance de ses corps qui, on se le rappelle, semblaient maintenant en position d’opérer des deux côtés de l’Aisne : le 18e corps sur Craonne, le 1er sur Ville-au-Bois et la croupe du Choléra, le groupe Valabrègue sur les hauteurs Est de Berry-au-Bac, tandis que le 3e corps opérerait encore sur Brimont. Fortement combattue par l’artillerie lourde ennemie, cette attaque ne fit dans la journée « que des progrès insignifiants » dont « le brouillard intense » gêna le développement. Le 18e corps continua à tenir, de la ferme d’Hurtebise aux lisières Sud de Craonne, les positions conquises sans les porter sensiblement plus au Nord. Le 1er corps entama le bois de Ville-au-Bois, et prit la ferme du Choléra. Le groupe Valabrègue réoccupa Berry et une des hauteurs. Le 3e corps subissait entre la ferme du Godât et Courcy une effroyable canonnade, tandis que faisaient défaut les munitions de 75. Le 24, le général d’Esperey constatait que « le résultat cherché, en fixant l’ennemi, était obtenu, mais que la 5e armée, se trouvant actuellement en pointe par rapport aux armées voisines, devait se borner à se consolider. »

De son côté, le général Maunoury constatant, après une tournée sur ses lignes, que la poussée vers le Nord était « en ce moment une espérance vaine », estimait que, « sauf