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rive droite de l’Aisne pour agir avec le 13e. Le 4e l’y suivait et on allait dépêcher vers la région de la Somme un corps de plus (le 20e) prélevé sur les forces de l’Est et, qui, avant peu, prolongerait encore le dispositif à gauche.

Mais en attendant, il fallait que 13e corps agit vigoureusement et rapidement : on savait, dès le 10 au soir, au Grand Quartier, que la VIIe armée (Heeringen) était transportée de l’Est dans la région Aisne-Oise ; détachant simplement un de ses corps en face de d’Esperey, il était probable qu’elle se porterait à la droite de Klück : dès le 18, elle serait déjà en mesure d’agir[1], et si nous n’avions pris les devants, en nous jetant dans la direction de Saint-Quentin, par Noyon, au lieu de déborder l’ennemi, nous étions par lui débordés.


Devant le 13e corps en marche sur Noyon le 17 au matin, il n’y avait, nous le savons, que deux divisions. On les devait à tout prix bousculer. Il eût fallu à la tête de ce corps un Maud’huy, à la tête de ses divisions des Mangin et des Passaga, — des oseurs. Il paraît bien que l’opération fut assez mollement menée. La journée du 17 par surcroit fut effroyable : la pluie ne cessa de tomber de neuf heures du matin à la chute du jour. La boue empêtrait la marche du corps d’armée. Par ailleurs, si les forces d’infanterie qu’il s’agissait de bousculer n’étaient pas supérieures aux nôtres, la terrible artillerie lourde allemande, à laquelle nous ne pouvions guère opposer que nos 75, ravageait les rangs français et terrifiait, — car c’était presque une nouveauté. « Enorme lutte d’artillerie, écrit, sur son carnet, un officier français, le 17 au matin, du poste de commandement du 13e corps. De minute en minute, d’énormes rafales d’artillerie lourde et de canons de campagne. La pluie commence à tomber. » L’officier voyait le général « très hésitant. » Il a, de Clairoix, l’impression que les divisions, engagées dans « le massif boisé au Nord de Compiègne, » — la « Petite Suisse », — mènent « un combat confus, sans ordre et mal conduit. » Loin d’avancer, la 25e division (du 13e corps) a reculé, ce qui, isolant derechef la 37e division sur le plateau de droite, à Cuts, a jeté toute la gauche de la 6e armée dans

  1. Le 18, le général von Heeringen était déjà à Château-Porcien, entre Bethel et Laon, poussant vivement ses corps vers l’Ouest.