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et le pont, il avait, après une lutte sanglante autour de l’église, rejeté l’ennemi au Nord, s’était incontinent jeté sur la ferme du Choléra, avait arraché la position avec 200 prisonniers il l’Allemand. Mais le groupe Valabrègue, n’arrivant pas à déboucher, laissait Maud’huy fort en l’air, et les attaques du 3e corps, chargé de soutenir les divisions de réserve, s’en trouvait empêché, étant lui-même gêné par l’arrêt de la droite de la 6e armée. Pour libérer celle-ci et activer le mouvement, d’Esperey sollicitait l’appui de la 9e armée à sa droite : s’il lui était donné, il pourrait orienter vers le Nord l’attaque de ses gros.

En attendant, il tenta, le 15, un grand effort sur tout son front. Cet effort parut d’abord heureux. Le 1er corps enlevait le château de Brimont à droite. Mais, au centre, Valabrègue, continuant à marquer le pas devant de fortes attaques ennemies, Maud’huy fut appelé à la rescousse : le 1er Corps, par ailleurs, se porterait au sud du 48e pour l’appuyer. Celui-ci devait, le 15, en attendant cet appui, se maintenir sur ses positions d’Hurtebise à la Ville-au-Bois. Maud’huy était inquiet de son flanc droit qui jusqu’à nouvel ordre restait découvert ; les Allemands attaquant sur la Ville-au-Bois, on perdit le village. Ordre fut donné de le reprendre. Au centre, une autre attaque allemande se produisait sur le Nord de Craonne et l’on se devait replier sur le bourg. En revanche, à gauche, la brigade Pichon, descendant du plateau, lançait ses éléments sur Ailles, dans la vallée de l’Ailette.

Mais, sur ces entrefaites, Valabrègue perdait ses positions de la rive gauche même et la situation de Maud’huy devenait, partant, de plus en plus scabreuse. Il reporta de Pontavert sur Roucy son quartier général. C’est de la tour « qui formait un splendide observatoire » que le général surveille dès lors la bataille. La tour de Roucy ! En cette région de l’Aisne, les guerriers coudoient, si j’ose dire, à chaque pas, les ombres des guerriers morts. Voici, ses soldats marchant par ailleurs sur les traces des grognards de l’Empereur, ce vaillant Maud’huy en pleine chevalerie !

La journée du 16 pouvait être décisive de ce côté : d’Esperey s’apprêtait enfin à jeter son gros dans la trouée. Les 3e et 10e corps assurant sa droite vers l’Est, le 18e allait reprendre ses attaques, appuyé par le 1er maintenant à son Sud, et le groupe Valabrègue, ainsi dégagé, pourrait réparer ses échecs et aller