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De même, le marché du tungstène appartenait à une seule maison de Hanovre. La question se pose souvent ici pour nous sous une forme nettement défensive. Il s’agit, avant tout, de nous affranchir, comme nous aurons à le faire pour les matières colorantes.

Dans cette intention, le 11 décembre 1917, à la Chambre des Communes, M. Bonar Law, chancelier de l’Echiquier, a fait approuver un projet défendant, pendant cinq ans après la paix, tout commerce de certains métaux, tels que le plomb, le zinc, le nickel, l’étain, l’aluminium, le cuivre, etc. entre les maisons anglaises et les maisons ennemies. Ce projet, a-t-il dit, né des délibérations de la première Conférence de Paris en juin 1916, appliquait la première résolution de ce Congrès ainsi conçue : « Les Alliés décident de prendre sans délai les mesures nécessaires pour s’affranchir de toute dépendance des pays ennemis relativement aux matières premières et objets fabriqués essentiels pour le développement normal de leur activité économique. »

Je vais me borner à insister sur deux ou trois métaux, pour lesquels nous avons mieux à faire que de nous défendre, l’Allemagne ayant besoin de nous pour se les procurer.

Parmi les grands métaux, le cuivre est le plus important après le fer et l’un de ceux pour lesquels nous sommes le mieux armés, sans même avoir à faire intervenir un déplacement espéré des frontières. Il ne faudrait pas, à cet égard, se laisser abuser par certaines déceptions qu’a pu causer l’expérience du blocus. Des esprits trop optimistes avaient cru trouver là un moyen décisif pour empêcher l’Allemagne de fabriquer ses munitions. On pouvait facilement voir, et je l’ai montré ici à une époque où je partageais d’autres illusions dissipées depuis, que les stocks latents de cuivre travaillé fourniraient longtemps les quantités nécessaires à l’armée, étant donnée surtout la possibilité de piller systématiquement jusqu’à la dernière parcelle de métal dans d’immenses territoires envahis. Il n’en est pas moins vrai que les Allemands vivent, à cet égard, d’expédients, de réquisitions et de succédanés ; et que c’est un régime auquel ils ne pourraient continuer à se soumettre pendant la paix sans ruiner nombre de leurs industries, et d’abord les industries électriques si florissantes. Où est pour eux le beau temps de l’avant-guerre, alors qu’ils s’efforçaient d’absorber le