Page:Revue des Deux Mondes - 1918 - tome 46.djvu/689

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

balata). Néanmoins, si on ne veut pas se leurrer, il faut envisager certaines objections, qui joueront surtout dans l’après-guerre.

La première vient des neutres, et particulièrement de la Hollande, dont la germanophilie est connue. Même en temps de guerre, la Hollande a réussi à ravitailler par fraude l’Allemagne : à plus forte raison, en temps de paix. Or, les plantations hollandaises, encore jeunes, sont en voie de développement rapide. Java et Sumatra ont passé de 9 000 tonnes en 1915 à 16 000 en 1916. La superficie plantée a presque doublé de 1913 à 1915. Il existe actuellement 180 000 hectares de plantations dans ces deux îles et 10 000 à Bornéo. L’accroissement, fort heureusement, ne produira pas son effet de suite après la guerre, dans la période la plus importante ; mais il empêche d’envisager des mesures bien durables. Pour les possessions anglaises elles-mêmes, on pourra rencontrer quelques difficultés du côté des producteurs lésés.

Il faut également considérer les caoutchoucs régénéré ou artificiel et les succédanés. La régénération des déchets s’est beaucoup développée, la guerre aidant ; elle ne peut encore donner le caoutchouc de bonne qualité pour pneus de poids lourds ; mais elle réussit dans beaucoup d’autres cas. Le caoutchouc de synthèse, cherché depuis longtemps par la maison Bayer de Cologne et par une maison de Charlottenbourg, donne des résultats médiocres, qui sont périodiquement tambourinés avec fracas. Cependant, on a réalisé des progrès depuis la guerre pour le caoutchouc durci et, aux cours actuels d’Allemagne, on a pu commencer en 1917 à travailler couramment avec le carbure de calcium transformé en acétone. On a encore remplacé les bandages par des entrelacements de fils d’acier, par des alternances de papier mince goudronné et de toile métallique, par du bois, du chanvre, etc. mais ces essais, qui montrent seulement l’intensité de la disette, ne pourraient avoir aucune valeur en temps de paix.

Les produits oléagineux, dont on extrait des corps gras et de la glycérine employée pour les fabriques d’explosifs, appartiennent, eux aussi, presque totalement aux Alliés. Sur 14 000 000 tonnes de produits exportables, les Alliés disposent de 12 000 000, les neutres et les Russes de 2 000 000, et les ennemis en tiraient seulement 184 000 de leurs colonies,