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300 millions de francs les stocks de laine brute ou manufacturée volés par les Allemands à Roubaix et Tourcoing seulement. À quoi on peut ajouter la Belgique, qui possédait près de 700 000 broches et 100 000 métiers. Les usines de Dînant ont été détruites et celles de Verviers fortement endommagées. Tout cela devra être restauré et remplacé. D’autre part, l’industrie lainière française éprouvera une certaine gêne pendant que le commerce sera supprimé avec l’Allemagne : impossibilité de se procurer des laines très fines de Silésie, dont nous prenions 1 200 tonnes ; suppression d’un débouché pour notre industrie de Mazamet et surtout pour la laine cardée et peignée.

L’Allemagne, en sens inverse, a bénéficié de ses pillages, non seulement sur notre front, mais aussi en Pologne, et a conservé ses usines intactes. Néanmoins, le blocus a fait sentir progressivement son influence sur cette industrie.

En temps normal, les importations de laine brute ou lavée en Allemagne s’élevaient à près de 200 000 tonnes, dont 11 pour 100 en laine lavée et le reste en laine brute. Sur ce total, 77 000 venaient de l’Australie, 50 000 de l’Argentine, 26 000 de l’Afrique méridionale anglaise, 11 000 de Belgique, 9 000 de l’Uruguay et 6 000 tonnes de France. L’Allemagne importait, en outre, pour la laine cardée et peignée, un excédent d’environ 11 000 tonnes et autant de filés de laine ou d’autres poils d’animaux. Au total, l’excédent des importations pour les matières premières des lainages s’élevait, en 1913, à 500 millions de francs. Dans le commerce spécial d’importation, la part de la laine montait à 817 millions de francs à l’importation et 708 millions à l’exportation. En outre, l’Autriche-Hongrie importait 42 000 tonnes de laines, cardées et peignées. Ainsi, contre une importation de 240 000 tonnes dans les Empires centraux, la production indigène était seulement de 12 000 tonnes pour l’Allemagne et 19 000 pour l’Autriche-Hongrie.

Si l’Allemagne, après la guerre, ne pouvait plus s’alimenter en Australie, dans l’Afrique du Sud, en Belgique et en France, elle n’aurait plus comme gros fournisseur possible que l’Argentine ; car la Russie, qui lui a fourni au total 2 000 tonnes en 1913, a ses propres usines à alimenter et sa balance était au total très largement importatrice (pour près de 200 millions de francs).

La fermeture des Colonies anglaises serait un coup très grave