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garde des lignes ferrées n’offrirait jusqu’aux limites sino-russes, c’est-à-dire jusqu’aux stations de Mandchurie et de Tchita, que d’assez médiocres obstacles. — Au-delà de ces limites, et s’il faut en croire les plus récentes informations transmises d’Orient, l’influence bolchéviste, qui n’avait pas d’abord rencontré grande résistance, serait, au contraire, aujourd’hui avantageusement combattue, non seulement par les Cosaques de Semenow et les Tchéco-Slovaques, mais par le gouvernement indépendant qui s’est constitué en Sibérie et qui ne reconnaît plus la loi des soviets.

Plus loin, à l’Ouest, s’ouvre la région plus exposée, d’Irkoutsk et de Krasnotarsk à Tomsk, Omsk et Samara. Les dépêches des dernières semaines annonçaient que les Tchéco-Slovaques, rassemblés en trois ou quatre groupes distincts, dominaient dans les gouvernements de Tobolsk, de Tomsk, de Samara et dans les steppes des Kirghiz, et qu’ils s’étaient emparés des villes principales, notamment d’Omsk, de Samara, d’Ekaterinenbourg.

S’il en était ainsi, non seulement la pénétration germanique serait dès à présent enrayée, mais la reconstitution de centres russes où la vie nationale et la force de résistance se ranimeraient pourrait être envisagée comme prochaine. Il y aurait de la sorte entre les régions du Volga, du Baïkal et de l’Oural comme une première zone de restauration d’une Russie prête à se ranger sous une loi régulière et à demeurer attachée à sa tradition domestique, à la liberté et aux intérêts permanents du pays. Entre cette zone elle-même et les lignes de protection de l’Asie orientale s’établiraient, le cas échéant, des rapports, des contacts, ou même une action commune. Dans la région plus méridionale, sur toute la frontière du Turkestan, la Chine saurait, avec ses alliés, opérer le barrage nécessaire, que les obstacles naturels, d’ailleurs, l’aideraient à préserver et maintenir.

La Russie, que l’empereur Alexandre III appelait la sixième partie du monde, est à la fois si vaste et si continue, la communication entre les diverses régions est, en général, si unie et égale que, par les lignes ici mentionnées de l’Asie orientale, de la Sibérie et de ce que M. Edmond Demolins, dans son essai de géographie sociale sur les grandes routes des peuples (Comment la route crée le type social), nommait la route des steppes, la jonction, ta collaboration des deux grands États