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de Brest-Litovsk que, d’ailleurs, les Alliés ont aussitôt considérés comme nuls et non existants. Tout au contraire, la menace que l’annexion et la domination allemandes font peser sur la Russie défaillante oblige-t-elle les Alliés à fortifier et consolider les états et appuis par lesquels la Russie peut se soutenir ou se redresser. Ses possessions, ses intérêts, ses droits dans tout l’Orient de l’Empire et en Asie sont, à cet égard, placés sous une garantie et protection qui doit lui être d’autant plus assurée que le devoir et l’intérêt de tous les Alliés concordent avec l’intérêt essentiel de la Russie.

Les engagements que la Russie a envers les Alliés, notamment la Chine et le Japon, comme envers elle-même, ne permettent pas d’abandonner la moindre parcelle du domaine et de l’influence qui lui appartiennent dans la lointaine Asie. Par voie de conséquence et de réciprocité, la Chine et le Japon, et d’une façon générale, les Alliés sont engagés et obligés de même à sauvegarder et défendre des avantages et des droits dont ils partagent avec la Russie la protection, comme le bénéfice. N’y eût-il que cette considération, elle suffirait pour tracer aux Alliés leur devoir. Dans le programme de justice et de revendication qui est le leur, ils ne sauraient sacrifier et livrer à l’avidité et à la rapacité germaniques des territoires, des richesses, des réserves d’avenir, des débouchés et des passages que, depuis si longtemps, les diverses puissances de l’Entente ont eu l’ardent et constant souci de soustraire à l’action et aux desseins des Empires de proie. C’est un patrimoine commun qu’il s’agit de sauver, c’est aussi une voie sûre et un moyen efficace, non seulement de récupérer de riches et précieuses épaves du naufrage russe, mais peut-être de relever le bâtiment et le pavillon.


IV

Le Japon, en recueillant au traité de Portsmouth certains des droits, avantages, baux et privilèges que la Chine avait concédés à la Russie en Mandchourie, avait eu la sagesse de laisser à la Russie elle-même dans la Mandchourie du Nord la zone d’influence et la voie de transit qui lui étaient nécessaires pour la communication rapide et facile entre l’Europe, l’Asie et le bassin du Pacifique, — Bien mieux, il a su, dès la