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Qu’importe, je le sais, cette heure est éphémère,
Car le plus beau destin est cruel malgré lui,
Même quand il emprunte une voix printanière
Pour nous parler d’aurore alors que vient la nuit.

Et quand vous partirez et que ma vie obscure
Sera plus sombre encor de cet éclair trop court,
N’écoutez pas crier le sang de ma blessure,
Si je pleure dans l’ombre en maudissant l’amour,

Car votre chère voix et votre cher visage
Un instant m’ont sauvé du temps injurieux,
Et c’est un dieu qui m’a, debout au noir rivage,
Parlé par votre bouche et souri par vos yeux.


ODELETTE


Demain ce sera l’automne,
Hier c’était le printemps ;
La vie au pas monotone
Parcourt le cercle du temps.

L’hiver a l’été s’oppose.
Janvier passe comme fuit Avril,
Et l’on voit la rose
Fleurir quand est mort le gui.

Tout s’achève et recommence,
Meurt ni renaît tour à tour,
Car de joie et de souffrance
Est fait l’éternel amour !

Le ciel s’argente ou se cuivre,
Aube ou couchant radieux…
L’essentiel est de vivre
Sous le regard de vos yeux !