Page:Revue des Deux Mondes - 1918 - tome 46.djvu/301

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Il ajoutait : « Maintenant il faut agir. Les efforts doivent tendre à préparer la reprise de l’offensive vers la ligne Demuin-Moreuil, vers l’Avre et Montdidier. » On devait « rompre avec la mentalité du secteur » et aller de l’avant. « La première phase de la grande bataille est terminée, concluait-il ; la deuxième va commencer. Nous tenons le bon bout. Que tout le monde s’y mette sans compter. » Mais, avant de pouvoir passer à cette offensive, le général Debeney devait encore subir, les 4 et 5 avril, un assaut qui devait réellement clore cette « première phase » dont il annonçait la fin.

Le 4, le temps était bas et nuageux ; le ciel nous désarmait ainsi en partie, puisque, de son fait, nos avions pouvaient difficilement remplir leur double tâche d’observation et de combat. Les Allemands, ce jour-là, tentèrent leur dernière chance sur le front Debeney. Le front Humbert, nous l’avons vu, tenait bon du Mont Renaud au Piémont : il était logique que le torrent, se heurtant au mur du Sud, vint derechef battre celui de l’Est. L’Allemand devait d’autant plus attaquer que, depuis deux jours, les intentions agressives du général Debeney étaient évidentes : avant l’aube du 4, nos troupes, jetées sur la ferme Saint-Aignan au Sud-Est de Grivesnes, s’en étaient emparées ; on avait fait dus prisonniers et élargi les positions.

Mais, au lever du jour, une violente canonnade sur tout le front avait averti que, du côté allemand, une grosse action se préparait, du Nord de Hangard au Sud de Grivesnes ; encore cette attaque sur un front déjà large de plus de quatre lieues n’érait-elle, dans l’esprit du commandant allemand, que le prélude d’un assaut d’enfoncement sur toute la ligne du Sud de Montdidier au Nord de Guillaucourt.

A sept heures trente, la bataille d’infanterie commençait. Dix assauts successifs en masses compactes devaient se succéder, formidables coups de bélier d’un ennemi que chaque échec enrageait.

Dès huit heures, le premier assaut était repoussé ; la ferme Saint-Aignan, conquise pendant la nuit, devait être la première attaquée ; le 67e régiment qui l’avait prise, la défendit et, sur cette avancée à peine conquise, tint tête à l’ennemi ; Grivesnes, assailli à l’Est, était défendu avec la même ardeur et le même succès, par le 25e chasseurs à pied. Une deuxième, une troisième attaque se brisent, enrayées, dès le principe, par les tirs de barrage et de mitrailleuses. Or, c’était la Garde qui