Page:Revue des Deux Mondes - 1918 - tome 46.djvu/272

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

La nuit était tombée : Pellé quitta la ville après avoir donné l’ordre d’incendier les dépôts de la gare et les approvisionnements qu’on n’avait pu enlever. C’est à travers la malheureuse cité, complètement vide et violemment éclairée par les incendies, qu’en très bon ordre, la division Gamelin gagnait les positions du Sud ; les Allemands cependant se ruaient sur nos derrières ; le général Dauve, commandant l’infanterie de la division, les contenait avec le 51e d’infanterie qui, se portant sur Porquéricourt, avait été par lui arrêté et opposé à la ruée. A deux heures du matin, le 57e lui-même, enfin, rétrogradait, livrant de partiels combats dans les faubourgs Nord de Noyon et, en ayant ainsi imposé à l’ennemi, pouvait gagner l’Oise. L’ennemi se jetait alors-sur la ville abandonnée. Cependant, à droite, la division Brécard en lambeaux et les troupes anglaises franchissaient l’Oise à Varesnes sous la protection du 1er régiment qui, à son tour, passait le fleuve et faisait sauter le pont.

Maintenant, installé sur la rive gauche jusqu’à Sempigny, sur les hauteurs du massif du Mont Renaud, et sur les collines du Sud-Ouest de Noyon, le corps Pellé, reformé et bien assis, s’apprêtait à reprendre la lutte, résolu à barrer là, coûte que coûte, la route de Paris, et c’est sur cette ligne qu’il allait en effet repousser les assauts et faire décidément échec à l’Allemand.


XI. — LE 25 MARS. DE NESLE A MONTDIDIER

Si tragique qu’eût été pour la droite d’Humbert cette journée du 25, elle l’avait été bien davantage pour sa gauche qui occupait au matin une ligne allant de la région de Roye à celle de Guiscard, et si elle se terminait pour la droite par l’organisation d’un solide barrage, il n’en était pas de même plus à l’Ouest.

Dès l’aube s’était, autour de Nesle, engagée une bataille violente et, de notre côté, assez confuse. Les troupes britanniques, on se le rappelle, ramenées des rives de la Somme sur la région de Nesle, avaient fait appel à l’armée Humbert, et la 22e division avait été poussée rapidement vers la ville menacée ; elle avait trouvé la situation compromise : et, à onze heures, il avait fallu abandonner la ville.

Les troupes britanniques s’étaient alors retirées fort excentriquement vers Herly (à l’ouest de Nesle), laissant à la 22e le