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belle et prompte occasion de se manifester. Qu’elle s’y affirme donc, dans un geste large de conciliation et de concorde, tant chez les Flamands que chez les Wallons.


Quel est aujourd’hui le programme de revendications des Flamands, qui ont méprisé les cajoleries et repoussé les présents de l’Allemagne ? Ils demandent ce qu’ils réclamaient avant la guerre. Rien de moins, rien de plus. « Ils veulent, — dans le pays flamand et pas ailleurs, — être jugés et administrés dans leur langue. Ils veulent, — dans le pays flamand toujours, — que l’organisation de l’enseignement flamand à tous les degrés soit en harmonie avec le caractère flamand du pays. Ils veulent qu’au sein de l’armée les soldats flamands se trouvent placés, au point de vue de la langue dont les chefs se serviront vis-à-vis d’eux, sur un pied de parfaite égalité avec les soldats wallons. Ils désirent enfin que la vie privée et, publique, en pays flamand, ait un caractère flamand, tout comme, en Wallonie, elle doit conserver un caractère français. En un mot, ils veulent que, dans une Belgique une et indivisible, la culture flamande ait sa place au soleil, qu’elle soit respectée, favorisée et soutenue par les pouvoirs publics dans une mesure parfaitement égale à celle dont jouit la culture française. »

Qui s’exprime de la sorte ? Un des ministres de notre défense nationale, M. Poullet, dans un appel aux soldats belges[1]. Et il ajoute avec infiniment de raison : « Qu’y a-t-il dans ce programme qui attaque de la façon la plus indirecte les intérêts permanents et fondamentaux de la Wallonie ? Qu’y aurait-il de changé à Liège, dans le Hainaut, dans le Luxembourg, si ce programme venait à se réaliser dans les provinces flamandes ? Rien, absolument rien. » C’est l’évidence même. Les Wallons, j’imagine, en demeureront d’accord.

Les organes libres de la pensée flamande qui s’impriment à l’étranger protestent, de leur côté, que rien ne subsistera de ce qui porte en Flandre l’estampille et la livrée allemandes. Avant donc d’installer à Gand leur université, à laquelle les Flamands tiennent plus que jamais, en refusant de la recevoir des mains d’un gouverneur ennemi, ceux-ci purifieront

  1. Le Livre du Soldat belge pour 1918 (Berger-Levrault).