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secondaire ; nous appelons ce dernier chez nous l’enseignement moyen. Mais l’étudiant flamand était abandonné au seuil de l’université. Il saute aux yeux qu’on ne pouvait s’en tenir là et que la formation de ce jeune esprit eût été incomplète, si la réforme était restée confinée aux degrés inférieurs. Le soin même qu’on avait pris de lui donner les éléments de l’instruction en flamand le plaçait dans un état d’infériorité manifeste pour l’achèvement de ses études en français vis-à-vis de ses condisciples qui avaient fait leurs classes dans cette langue. Il ne suffisait pas de créer pour lui des écoles et des athénées ; il fallait lui ouvrir les portes d’une université flamande.

Était-il besoin, pour ce faire, de déloger l’enseignement français de l’université de Gand, siège d’ancienne culture, illustré par des maîtres, dont la réputation avait franchi nos frontières ? En droit civil, l’opinion de Laurent, pour ne nommer que celui-là, est citée dans les Facultés françaises à côté des autres lumières qui éclairent le commentaire de notre code. Les professeurs d’aujourd’hui marchaient sur les traces de leurs aînés. L’un d’eux, Franz Cumont, a l’honneur envie de faire partie de l’Institut de France. Henri Pirenne, par ses travaux sur l’histoire de Belgique, était en passe d’acquérir une renommée européenne, quand les Allemands y ont imprimé le sceau glorieux de la persécution. Transformer l’université de Gand, c’était vraiment demander un sacrifice douloureux à beaucoup de Belges. Pour quelles raisons les Flamingants ne voulaient-ils pas qu’on érigeât dans une autre ville, à Anvers par exemple, leur université, Jérusalem nouvelle du culte flamand ?

On pourrait alléguer que la Belgique possède déjà quatre universités : deux de l’Etat, à Gand et à Liège, et deux fondations libres, à Louvain et à Bruxelles. Elles suffisent à un pays de 29 000 kilomètres carrés et de 7 millions et demi d’habitants. A dépasser ce chiffre, on risquerait d’abaisser le niveau des études par la difficulté de recruter des professeurs d’une notable valeur scientifique, de qui dépend le rayonnement exercé au dehors par un foyer d’instruction. Attirer le plus grand nombre possible d’étudiants n’est pas une considération à dédaigner en ce temps de concurrence effrénée dans tous les domaines, y compris ceux de la pensée.

Mais les motifs qui ont fait s’obstiner les protagonistes du mouvement à réclamer la flamandisation de l’Université de