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n’ai nulle prétention à cet égard, mais j’ai la conviction que jamais des considérations d’intérêt n’entrent pour rien dans telle ou telle chose.

« Puisque vous m’amenez à vous dire ce que je pense du second Faust, j’ai regardé le travail de Henri Blaze comme bon, malgré ses défauts, parce qu’il faisait connaître une production bizarre d’un grand écrivain, production inconnue en France ; mais, pour mon compte particulier, je n’aime pas mieux le second Faust, que les Sept Cordes de la Lyre.

« Je suis assez simple pour juger cela, sauf quelques parties, comme un cauchemar, et ce qui me console, c’est que M. Cazalès, qui est un homme très distingué, m’assurait, il y a quelques jours, que Scheliing en disait autant ; je me console en me disant que je ne suis pas tout à fait abruti, puisque Schelling a avancé publiquement la même chose.

« J’en viens à ce que vous me dites, que vous attendez que j’aie perdu ma place pour écrire une pièce. Je vous remercie de vos tendres souhaits, et de l’intérêt que vous me portez. Mais je suis assez désintéressé pour donner ma démission, si ma présence au Théâtre-Français doit vous empêcher de doter la France d’un grand ouvrage dramatique. Mettez-vous donc à l’œuvre, faites un Hamlet ou un Othello, et ma démission est au bout.


« Je réponds maintenant à votre proposition de rupture partielle. Je ne l’accepte en aucune façon, et n’implore la pitié de personne. Je vous ai dit que j’exécuterais tout ce que j’ai signé ; je suis assez patient de ma nature et assez froid pour encourir toutes les chances d’un traité que j’ai consenti.


« Je garderai tout, ou je céderai tout : jusque-là, vous me trouverez toujours prêt à exécuter nos conventions, et, quand vous le voudrez, les relations que vous rendez difficiles, deviendront plus faciles. J’ai la conscience de n’avoir rien fait pour amener l’aigreur qui se manifeste chez vous, à des intervalles trop rapprochés.

« Je vous le répète, c’est là le fait de vos intermédiaires ; et pourquoi, encore une fois, des intermédiaires entre nous ?

« Tout à vous donc, tigresse d’Hyrcanie[1]. »

  1. Collection S. de Lovenjoul.