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la Somme, où la 39e division le contint près de Proyart ; mais en même temps, étant plus avancé au Nord de la rivière qu’au Sud, il essaya d’en profiter pour passer de la rive Nord sur la rive Sud, dans le dos de la 39e division, à Cerisy. Le lieutenant-colonel H… qui commandait le secteur gauche du détachement Carey, sortit alors de ses lignes avec ses hommes, et alla pendant plusieurs heures interdire le passage. Il fut malheureusement contraint de se replier.

Cependant, le détachement grossissait de 300 officiers et soldats convalescens du camp de Cerisy, de 400 officiers et soldats du 2e Canadian Railway Battalion et de 2 000 isolés environ de la 3e armée. C’est ainsi que le détachement put repousser le 29 les énergiques attaques de l’ennemi. Le 30, les renforts arrivèrent enfin. Ce fut d’abord une brigade australienne ; puis le secteur gauche, fut repris par la 1re division de cavalerie, le secteur droit par la 61e division. Enfin le détachement fut relevé le 31 par la 18e division, et ultérieurement disloqué.

Tandis qu’il interdisait le passage à l’ennemi, on avait travaillé à construire à l’arrière une nouvelle ligne, qui redoublât la première. Cette ligne est pour ainsi dire tracée sur la carte. Elle commence au Nord, au bois l’Abbé, et se prolonge au Sud par Cachy. Mais comment en assurer la construction à un moment où on n’avait même pas d’hommes à mettre en première ligne ? Cinquante officiers vinrent de Boves en camions le 28 mars, à sept heures du matin. Ils s’espacèrent du chemin de fer Amiens-Chaulnes jusqu’à Cachy, sur la ligne à construire. Ils avaient 14 fusils mitrailleurs, et 500 pelles et pioches. Ils avaient l’ordre de recueillir tous les traînards et de les mettre au travail. Le 1er avril, ils avaient ainsi pris au filet 700 hommes, et les travaux étaient fort avancés.

Telle est l’histoire sommaire du recul de la 5e armée, entre le 21 et le 30 mars. Comment fonctionnait le mécanisme allemand qui la contraignait à reculer ?

Un régiment allemand, en ligne pendant l’attaque du 21 mars, présentait l’aspect suivant : en attendant le signal de l’assaut, il avait deux bataillons dans la tranchée de première ligne, et le 3e bataillon dans la tranchée de soutien. Le signal donné, il effectuait deux mouvemens ; tout d’abord les trois bataillons s’avançaient simultanément, de façon à franchir le plus rapidement la zone dangereuse du tir de barrage ; une