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irréguliers et des dépressions profondes. La première position ennemie était au bas de ces hauteurs.

« Elle commençait à la Somme près de Curlu, courait au Nord pendant trois kilomètres, tournait à l’Ouest et gardait cette direction pendant sept kilomètres, et vers Fricourt tournait de nouveau au Nord. Fricourt formait donc le sommet d’un grand saillant de la ligne ennemie. A dix kilomètres au Nord de ce village, la ligne passait l’Ancre, franchissait le faite de partage en direction du Nord vers Hébuterne et Gommécourt et redescendait les éperons septentrionaux vers Arras. »

Entre la Somme et l’Ancre, elle se développait sur une vingtaine de kilomètres. Elle était redoublée en arrière, à une distance variant de 3 à 5 kilomètres, par une seconde position, établie à la crête méridionale du faite de partage. « Dans une occupation de près de deux ans, l’ennemi n’avait rien épargné pour rendre ces positions imprenables. Elles étaient formées, l’une et l’autre, de plusieurs lignes de tranchées profondes, avec des abris à l’épreuve et de nombreux boyaux. Le front de tranchées, dans chaque position, était protégé par des réseaux souvent doubles, larges de quarante mètres, faits de pieux de fer entrelacés de fils barbelés, souvent épais de presque un doigt. Les bois et les villages, soit sur les positions, soit entre elles, étaient changés en forteresses ; les caves profondes qu’on trouve dans le pays, les fours à chaux, les carrières servaient d’abri aux mitrailleuses et aux mortiers de tranchée ; des caves nouvelles étaient creusées, souvent à deux étages, reliées par des passages à dix mètres sous terre. Les saillans de la ligne exposés aux feux d’enfilade étaient consolidés, changés en forteresses, souvent défendus par des champs de mines ; de fortes redoutes, des emplacemens bétonnés de mitrailleuses étaient disposés en des points d’où les Allemands pouvaient balayer leurs propres tranchées, au cas où elles auraient été prises. Le pays se prête bien à l’observation d’artillerie, et l’ennemi s’était arrangé pour y croiser ses feux. «Tout avait été calculé pour que les points d’appui se flanquent et s’entr’aident, et l’ensemble était formé moins de lignes successives que d’un immense et unique système homogène, profond et puissant. Derrière la seconde position, l’ennemi avait déjà non seulement organisé les bois et les villages, mais complété plusieurs lignes, elles avions le voyaient travailler fiévreusement,