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militaires d’Amérique ; couler les « cargos, » paquebots et voiliers dont l’incessant afflux ravitaille et réapprovisionne les Alliés.

Et maintenant, ce type nouveau de croiseur sous-marin, quelles caractéristiques essentielles présente-t-il ? Quelles sont ses principales facultés ? A quelles opérations peut-il servir, en dehors de la poursuite et de la destruction des paquebots et transports, naviguant isolément ou en convois ?

Logiquement et s’il s’agit bien, en effet, d’un « croiseur » sous-marin, la faculté dominante de ce bâtiment doit être l’étendue du rayon d’action. Il est difficile de fixer un chiffre de milles marins à ce sujet, d’autant mieux qu’une telle indication devrait varier singulièrement avec les prévisions de marche en plongée [1], la dépense de combustible étant, dans cette circonstance, beaucoup plus forte que dans le cas de la marche en surface, à moins que l’on ne se résigne à une allure très lente. On estime généralement, toutefois, que les unités dont il s’agit peuvent rester à la mer pendant trois ou quatre mois. Ce n’est pas considérable, encore que suffisant pour les opérations dans l’Atlantique. Il est d’ailleurs bien entendu que les Allemands s’efforceront de procurer à leurs grands submersibles des ravitaillemens en cours de croisière. En 1915 et 1916, ces ravitaillemens auraient pu se faire en certains ports ou en certains abris écartés, sur le territoire de neutres assez complaisans pour fermer les yeux. Les « possibilités » dont bénéficiaient nos ennemis à cet égard se sont restreintes de beaucoup depuis un an ou dix-huit mois, mais il leur reste toujours la faculté des ravitaillemens à la mer, dans la mesure où les croisières des Alliés laisseront passer les « cargos » à l’aspect banal et innocent, qui seront chargés de cette dangereuse besogne.

Toujours est-il que nos adversaires ont dû faire tout au monde pour obtenir de leurs croiseurs submersibles une exceptionnelle endurance. Ils ont eu pour cela de pressantes raisons : ces grandes unités sont nécessairement en nombre relativement restreint ; il faut donc que le rendement effectif de chacune de leurs croisières ne soit pas diminué par de trop fréquens voyages d’aller et de retour, — sans parler de l’inévitable séjour dans

  1. Reconnaissons d’ailleurs que ces prévisions peuvent être assez réduites pour le type qui nous occupe ; on verra pourquoi par la suite