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DANS
LES
CAMPS DE REPRÉSAILLES

I

Nous donnons ici la relation de la dure captivité subie par un soldat français dans les camps de représailles. Le ton même du récit, sa simplicité et sa sobriété, sont les meilleures preuves de sa parfaite véracité. On jugera par là, et de la manière dont les Allemands traitent nos prisonniers, et de l’inlassable force de résistance que les nôtres opposent aux pires traitemens.

Blessé et fait prisonnier le 25 août 1914, en tentant de ramener dans nos lignes son sergent et un de ses camarades, tous deux grièvement blessés, l’auteur des pages qu’on va lire est acheminé en Allemagne par Luxembourg, Trêves, Coblentz, Cassel, Eisenach, Gotha, jusqu’au camp d’O... D’abord logés sous des tentes, les prisonniers sont astreints à un pénible labeur : transporter d’une forêt la coupe des troncs de sapins, pousser des wagonnets chargés de pierres. Décembre arrive : les souffrances du froid s’ajoutent à celles du dénuement et de la faim. En 1915, les prisonniers sont parqués dans un nouveau camp formé de douze immenses baraques, longues de plus de cent mètres, à toits plats, d’une contenance de mille hommes chacune. Ils couchent dans des bas-flancs à deux étages, véritable columbarium où, le soir, après le travail, ils viennent s’entasser pour la nuit. En avril-mai, X... tombe dangereusement malade, par l’effet des privations et du surmenage. Après un séjour au lazaret, et guéri tant bien que mal, grâce à sa forte constitution, il