Page:Revue des Deux Mondes - 1918 - tome 44.djvu/102

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
UN DEMI-SIÈCLE
DE
PENSÉE FRANÇAISE

Au mois de décembre 1870, en plein siège de Paris, au Collège de France, dans une leçon sur la Chanson de Roland, Gaston Paris s’exprimait ainsi :


Je professe absolument et sans réserve cette doctrine, que la science n’a d’autre objet que la vérité, et la vérité pour elle-même, sans aucun souci des conséquences bonnes ou mauvaises, regrettables ou heureuses, que cette vérité pourrait avoir dans la pratiqué '... Ainsi comprises, les études communes, poursuivies avec le même esprit dans tous les pays civilisés, forment au-dessus des nationalités restreintes, diverses et trop souvent hostiles, une grande patrie qu’aucune guerre ne souillé ', qu’aucun conquérant ne menace, et où les âmes trouvent le refuge et l’unité que la cité de Dieu leur a donnés en d’autres temps.


Quarante-quatre ans plus tard, un autre professeur au Collège de France, ne se piquant pas, celui-là, de planer « au-dessus de la mêlée, » mais « mû par une force supérieure à sa volonté, » venait jeter, du haut de la tribune de l’Académie des Sciences morales, « un cri d’horreur et d’indignation. » Au nom des « vivans et des morts, » M. Henri Bergson « vouait à l’universelle exécration les crimes méthodiquement commis par l’Allemagne. » Et il ajoutait :