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visites, à préparer ainsi son camouflet (dans les deux sens du mot), la Conférence des Alliés à Paris, était close par la déclaration réitérée de leur inébranlable résolution. Certaines difficultés, qu’on escomptait dans le camp adverse, ou n’avaient pas été soulevées, ou avaient été écartées, ou avaient été esquivées. Le fagot d’épines des questions balkaniques avait été délié par les mains souples des Grecs et des Italiens assis autour de la même table. L’opinion de la révolution russe sur « les buts de guerre » et le ferme propos des puissances occidentales ne s’étaient pas entre-choqués. La suite des conversations avait été opportunément renvoyée à une seconde réunion qui devait se tenir à Londres. Mais, dans le même temps et à Paris même, siégeaient, en une sorte de Conférence officieuse, à côté de la Conférence officielle, des délégués des partis socialistes de France, d’Angleterre et de Russie. Toujours la concurrence des diplomaties. Le Soviet de Pétrograd s’y était fait représenter par quatre plénipotentiaires, notamment par MM. Ehrlich et Goldenberg, qui sont, à n’en pas douter, d’excellens patriotes russes, bien que leurs noms ne rendent pas un très pur son de cristal slave. Ces quatre citoyens, tout frais émoulus de l’autocratie, nous ont prodigué leurs conseils avec une largesse parfois un peu choquante. « Voici ce que nous voulons, » tranchent-ils. Mais que veulent les autres ? Car les autres aussi ont le droit de vouloir. La révolution russe, ou quelques révolutionnaires, pensent et parlent de la sorte, c’est entendu. Et, avec leurs avis, qu’est-ce qu’ils apportent ?

Ce que MM. Ehrlich, Goldenberg et leurs compagnons ont dit, dans cette conférence à côté, nous passionne médiocrement et même nous intéresserait peu si nos socialistes, à nous, ne l’avaient pas entendu, et si ce n’étaient pas des perroquets. Le lendemain, M. Renaudel se perchait à la tribune de la Chambre. Sous le prétexte un peu gros d’empêcher M. le président du Conseil de favoriser par son silence la manœuvre de M. Michaëlis, il le sommait de renoncer publiquement pour l’avenir à toute autre garantie contre le retour d’une agression allemande que l’institution de la « Société des nations. » Mais l’homme peut s’instruire chez les bêtes, et se souvenir que la première « Société des nations » fut celle du Loup et de l’Agneau, et la seconde, celle des Animaux malades de la peste. M. Ribot l’a vu clairement et clairement dit. Il convient de lui en savoir gré, autant que d’avoir posé, comme une borne infranchissable à des empiétemens qui devenaient excessifs, cette maxime fondamentale : « Il n’y a pas, en France, d’autre gouvernement que