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des liquides organiques multiplie les ravages, il creuse dans la masse musculaire une vaste cavité. Car frappant les tissus dans une propulsion géométriquement non normale, entraînant des débris de vêtemens (capotes ou autres, bois, pierre, etc.), aux mouvemens de translation qu’avait précédemment le projectile s’ajoutent des mouvemens de rotation irréguliers qui sont facteurs de la constitution de cette cavité de dilacération intramusculaire.

Si le projectile, comme cela se produit très souvent, rencontre l’os, celui-ci lui oppose sa résistance, et les facteurs d’éclatement sont encore accrus notablement par la production d’esquilles osseuses plus ou moins détachées qui agissent de leur côté comme de nouveaux projectiles et aggravent les lésions par dilacération. Le ou les projectiles sont souvent situés à des distances très éloignées de ce que l’on pourrait supposer par leur orifice d’entrée et leur volume. Fait paradoxal : les débris vestimentaires se rencontrent souvent en des points tous différens des projectiles dans les cavités d’attrition. Nouvelle preuve des phénomènes de ricochet et de rotation considérables dont ont été le siège ces cavités. La question de la recherche des projectiles mérite d’ailleurs à elle seule une étude. Nous y reviendrons dans la suite. Entre ces deux types de plaies, — plaie par balle de plein fouet et plaie par éclat irrégulier de projectile explosif — se place un type intermédiaire comme degré de gravité. C’est celui qu’occasionne un shrapnell. Celui-ci en effet est un projectile à faible vitesse, non ricoché, et généralement retenu dans les tissus comme l’éclat d’obus. Selon les cas et le degré d’infection du projectile, on aura une blessure participant des caractères de l’un ou l’autre type : plaie peu septique ou plaie infectée modérément en général et guérissant par l’ablation du projectile.

Il convient maintenant, pour que cet exposé ne soit pas trop incomplet, d’examiner en quelques mots ce qui a lieu au point de vue histologique dans les différentes plaies de guerre.


Rien n’est plus intéressant que d’étudier microscopiquement les phénomènes successifs dont est le siège une plaie de guerre du type le plus général, c’est-à-dire produite par un fragment irrégulier de projectile explosif. Dans « cet horrible mélange d’os et de chair meurtris » et où l’œil lui-même n’aperçoit qu’un douloureux chaos, le microscope va nous découvrir tout un champ de bataille où des êtres