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d’ailleurs des débris de pierre, de bois, etc. Aussi les blessures qui en résultent ont-elles grandes chances d’être multiples. Cette multiplicité des plaies est parfois extraordinaire, et l’on a vu des soldats porteurs de plus de cent blessures. En outre, la vitesse relativement faible de ces fragmens de projectiles ne les échauffe souvent pas assez pour tuer les microbes que porte leur surface maculée. Enfin leurs bords déchiquetés déchirent et entraînent dans la plaie des fragmens d’uniforme et de linge eux-mêmes remplis d’impuretés. Donc généralement la plaie de guerre n’est dès l’abord pas aseptique.

Quelles sont les lésions constituées par les différens projectiles, autrement dit en quoi consiste essentiellement la plaie de guerre ? L’examen détaillé d’une telle question nous entraînerait trop loin et nous nous bornerons à en tracer un schéma, en éliminant d’ailleurs les plaies des cavités du crâne, du thorax et de l’abdomen. Celles-ci diffèrent du reste beaucoup à la fois les unes des autres et des plaies des membres.

Un membre envisagé schématiquement comprend essentiellement, de l’extérieur à l’intérieur, les couches anatomiques suivantes : la peau doublée d’un tissu cellulaire plus ou moins épais et d’une aponévrose d’enveloppe du membre. Ces trois couches réunies constituent un ensemble élastique et résistant. Au-dessous se trouve la masse musculaire dans laquelle sont les vaisseaux et nerfs principaux. Cette masse musculaire est moins élastique et surtout moins résistante que le système cutanéo-aponévrotique (qu’on me pardonne ces termes barbares, mais il faut bien appeler les choses par leur nom) qui enveloppe le membre. Enfin vient l’os, qui est très résistant et pas élastique.

En somme, le membre peut être envisagé comme composé d’une couche excentrique assez résistante, et d’une couche centrale très résistante ; entre ces deux couches se trouve la couche musculaire peu résistante. Cet ensemble peut être lésé par des agens vulnérans variables. Nous ne parlerons pas des contusions qui constituent les cas les plus simples, et sont en général peu graves et partant peu intéressantes, ni même des plaies par armes blanches. Ces dernières, lorsqu’elles ne sont pas d’une gravité telle qu’elles amènent la mort à brève échéance, sont au contraire souvent bénignes et ne diffèrent guère des plaies accidentelles qu’on rencontre dans la pratique de la chirurgie civile.

Les plaies par armes à feu sont de beaucoup les plus fréquentes et les plus graves dans la guerre actuelle. On en rencontre deux