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Pourquoi notre population civile ne se contente-t-elle pas, en ces heures de crise, du bien-être matériel qui paraissait suffisant à la génération précédente ? Pourquoi ses exigences actuelles sont-elles considérées comme légitimes, et pourquoi la consommation ne prend-elle pas, — au point de vue de la qualité, — le caractère de celle que l’on acceptait librement vers 1850 ?

C’est qu’aujourd’hui la taxation vient abaisser les prix et rend dès lors possible la persistance des habitudes prises depuis quelques années seulement.

On prétend, à cette heure, qu’il ne faut ni mécontenter, ni inquiéter les acheteurs ! Mais la force des choses, plus puissante que toutes les lois, ne va-t-elle pas contraindre le législateur à renoncer au système qu’il a momentanément adopté ? Les sacrifices imposés, en fait, à la nation tout entière, pour abaisser artificiellement le prix des alimens, ne sauraient être indéfiniment prolongés et accrus.

Cependant la taxation va provoquer la réduction de la production agricole nationale, et les pertes imposées à l’Etat commerçant dépasseront dès lors les forces contributives du pays en épuisant ses ressources financières.

Eh bien ! au lieu de farder la vérité, il faut la révéler ; il faut que tout le monde la voie en face. Il faut que la situation véritable du marché soit connue, et que la cherté même récompense les énergies productives pour prévenir un désastre, ou, du moins, pour éviter un grand danger.

Nous voyons clairement ce danger. Le système de la taxation, de la réquisition et des achats de l’Etat l’a créé. C’est ce système qu’il convient d’abolir avant qu’il ait produit toutes les conséquences dont on ne saurait trop résolument dénoncer la gravité.


D. ZOLLA.