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l’Allemagne peut se vanter de posséder encore, après deux ans et demi de guerre, une armée « en puissance » plus considérable que toutes celles que Moltke a jamais menées en campagne.

Ce système d’expédiens et de récupérations, de substitutions et de remplacemens, permet, une fois de plus, de faire le « plein » dans les dépôts. Ces ressources, ajoutées à celles des jeunes classes et des blessés guéris, vont suffire : 1° à alimenter le front et à combler les pertes courantes ; 2° à réaliser tout un programme de créations. Ce programme comprend deux parties. Une première série de divisions sera prête à entrer en ligne au mois de mars 1917. Elle est formée de 35 régimens (442 à 477) 3t porte, dans la série des divisions, les numéros 231 à 242 (outre la 15e bavaroise.) Une autre série de divisions, portant les numéros de la dizaine suivante (251 et au delà) est en train de s’organiser, dès la fin de janvier, avec les régimens de la série 600. Au début d’avril, une dizaine d’entre elles sont déjà repérées. Enfin, onze autres divisions sont formées au cours du printemps, soit par prélèvemens, soit par transformations d’unités existantes.

Au mois de mars, ce programme gigantesque est en voie d’achèvement. L’Allemagne est un vaste chantier de constructions ; elle fabrique à outrance des canons, des sous-marins et des divisions, mais cet effort représente à peu près sa limite. Elle ne peut puiser davantage dans son réservoir d’hommes sans tarir l’avenir. Déjà les divisions de la première série (231 et suivantes) font leur apparition. L’Allemagne a besoin d’un peu de temps encore pour mener à bien son ouvrage. Ce délai, la retraite va le lui assurer. On a vu que Moraht estime gagner ainsi deux ou trois mois. Dans trois mois, les sous-marins auront fait de la besogne. L’immense tenaille de la guerre navale aura resserré ses pinces ; l’Angleterre sera sur le point de crier grâce. Ce sera (si l’on admet l’hypothèse « offensive ») le moment de lancer les réserves, les trente ou quarante divisions dont le général von Ardenne commence à nous menacer [1], de jouer cette carte imprévue et d’obtenir, par un coup de masse, une écrasante victoire.

  1. Berliner Tageblatt, 13 avril.