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d’au moins trois mois ; c’est-à-dire qu’il faudra trois mois pour remettre sur pied une offensive franco-anglaise. » On peut d’ailleurs se demander « si la guerre sous-marine permettra à l’Entente de se procurer le matériel nécessaire à la construction d’une nouvelle base d’attaque [1]. » En attendant, l’Allemagne tient les Alliés à sa merci ; condamnés aux tourmens de l’insécurité, environnés partout « d’incertitudes et de menaces, » ils cherchent inutilement à « percer les ténèbres » et à déchiffrer le mystère des intentions d’Hindenburg [2].

Telle est, d’après les Allemands, la situation au lendemain de la retraite : l’offensive des Alliés est ruinée ; la guerre maritime se charge d’en prévenir le retour. L’Amérique, il est vrai, vient de déclarer la guerre ; mais l’Amérique est loin et son concours problématique. La révolution de Pétrograd paralyse la Russie. Hindenburg est le maître des événemens et l’arbitre de l’heure. Que l’ennemi étourdisse le monde de ses clameurs de victoire pour quelques misérables bribes de terre reconquise, mais qu’il se hâte de se réjouir ! « Rira bien qui rira le dernier [3]. »


II. — LES PROJETS ALLEMANDS ET LES ACCROISSEMENS DE l’aRMÉE

En effet, ce mouvement n’était qu’une préface. Il était bien entendu qu’après ce premier acte le rideau se relèverait sur un nouveau coup de théâtre, qui pourrait cette fois être un coup de tonnerre. Chacun répétait en Allemagne que la retraite n’était qu’une feinte, et ne faisait que cacher une de ces idées de derrière la tête « qui sont la marque de toutes les conceptions d’Hindenburg [4]. » « Le seul point sur lequel le doute n’est ‘pas permis, c’est que l’idée fondamentale, aujourd’hui comme hier, est l’idée d’offensive [5]. » — « Nous voulons, écrit-on encore, mener librement le combat décisif au lieu et au moment de notre choix, dans les meilleures conditions pour épargner nos troupes et briser à jamais les forces de l’ennemi [6]. » Endres, derrière le stratagème de l’armée allemande, entrevoit

  1. Schwübischer Merkur, 22 mars.
  2. Lokal Anzeiger, 14 mars.
  3. F. -G. Endres, Frankfürter Zeitung, 1er avril.
  4. Lokal Anzeiger, 14 mars.
  5. Ibid., 19 mars.
  6. Rheinische Westfülische Zeitung, 19 mars.