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Le jour arrive et on annonce que l’école maternelle Courmeaux est brûlée ainsi que nombre de maisons particulières et de magasins. Il y avait, parait-il, vingt-deux incendies allumés en même temps ! Aussi, les dévastations dans certains quartiers ont été considérables. Il est avéré que les Boches n’ont pas lancé cette nuit moins de 2 500 obus dont 150 incendiaires.

Mercredi 3. -— Après cette nuit terrible, j’ai donné congé aux écoles de la rue de Courlancy dont les élèves avaient été très impressionnés par le bombardement et suis allé visiter, aux caves Mumm, l’école Joffre, que j’ai fait photographier.

Vendredi 5. — Bombardement général de la ville : je ferme pour deux jours l’école « Albert Ier, » située dans un quartier très « arrosé » et où se trouvent des cantonnemens de troupes.

Samedi 6. — A dix heures m’arrive M. Brodiez, directeur de l’école u Dubail » (caves Champion), qui m’annonce qu’un 150 vient de tomber sur l’école et que des éclats ont rejailli jusque près des enfans qui jouaient dans le cellier du rez-de-chaussée. Personne de blessé cependant : les enfans ont été terrifiés, naturellement, mais il n’y a eu aucune panique. Depuis trois ou quatre jours, l’ennemi s’acharne sur cette école et sur le quartier. L’école « Dubail » sera fermée pour huit jours.

A quatre heures, Mlle Philippe, directrice de l’école « Joffre, » vient m’informer que l’insécurité augmente encore dans le quartier des caves Mumm sans cesse bombardé, si bien que les enfans courent les plus grands dangers et en se rendant en classe et en quittant l’école.

Lundi 22. — Encore une bien mauvaise journée. Dès six heures du matin, les avions volent de tous côtés. A 11 heures un quart, un avion boche survole le quartier de Courlancy et jette cinq bombes dont une sur la route de Bezannes, près du passage à niveau, où il tue une femme. Grand émoi au groupe scolaire de Courlancy en entendant ces formidables détonations. Je fais réunir les enfans dans une petite salle carrée au centre du bâtiment, qui me paraît plus protégée que le reste. Un mot de réconfort à tout le monde, les enfans reprennent leur air rieur et, l’aéro étant passé, les classes recommencent au bout d’un quart d’heure. Le lendemain, pas un enfant ne manquait : voilà l’effet que produisent sur les petits Rémois les bombes allemandes !