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RÉCITS DE L’INVASION[1]

III[2]
HISTOIRE
DE GOTTON CONNIXLOO

DEUXIÈME PARTIE

Plusieurs mois s’étaient écoulés depuis que Gotton avait avoué au forgeron le chagrin dont elle avait le cœur lourd. Ils n’en parlaient pas entre eux ; mais Luc voyait que Gotton était souvent absorbée, sa bouche avait pris un pli morne et le rayonnement de la jeunesse commençait à se ternir sur son visage. Il ne l’aimait pas moins ardemment, mais de la sentir insatisfaite le plongeait dans de sombres tristesses qu’elle percevait à son tour et attribuait à un regret semblable au sien. Sa peine et son inquiétude s’augmentaient d’autant.

L’hiver était venu et l’on approchait de la fête de Noël. Un soir, Luc, en s’asseyant à table pour dîner, dit à Gotton : « Veux-tu que nous allions ensemble à Malines pour la nuit de Noël ? J’entends dire que ce sera une grande fête de carillons et que toutes les cloches de la ville sonneront à la fois. » Gotton réfléchit un instant avant de répondre. Malines ? Elle n’y avait jamais été. Elle imagina une grande foule dans

  1. Copyright by Camille Mayran.
  2. Voyez la Revue des 15 juillet et 1er août.