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ne pouvons pas prendre l’initiative, après avoir déclaré que nous ne consentirions à aucune annexion. Non, non, nous ne le pouvons pas.

Ailleurs un ouvrier s’épuise en reproches sur les fraternisations.

— Eh ! comment ne pas fraterniser avec les Allemands quand ils nous crient : « Plus de guerre, Russes, plus de guerre ! »

Ailleurs un soldat proclame :

— Maintenant que nous avons la révolution, ce n’est plus le moment de s’occuper de la guerre. Les affaires intérieures, voilà ce qui est intéressant pour nous, camarades. Pourquoi marcherions-nous contre le militarisme allemand et pas contre l’impérialisme anglais et français ?

Quelqu’un n’a-t-il pas répondu l’autre jour à un marin de la mer Noire :

— Pourquoi prendre l’offensive sur le front allemand, au lieu de la prendre sur notre propre sol ?

Car de plus en plus s’affirme l’antagonisme entre le travail et le capital.


L’ANARCHIE DANS LES VILLES. — LA JACQUERIE DANS LES CAMPAGNES

Las d’avoir parlé sans convaincre, les anarchistes commencent à agir. Revenus d’exil, légers d’argent et de scrupules, ils ont jugé que le plus pressant pour eux était de s’assurer un gîte. Lénine leur a donné l’exemple, en s’emparant, comme l’on sait, du palais de Mme Ktchétinskaïa. En vain la célèbre danseuse a fait appel à la justice. J’ignore s’il y a encore « des juges à Berlin, » mais, à voir ce qui se passe, on se sent disposé à croire que la race en est disparue à Pétrograd.

Encouragés par ce résultat, messieurs les anarchistes ; auxquels se sont joints quelques bandits avérés ont pris possession du palais du comte de Leuchtenberg. Je tiens de la bouche d’une des proches parentes du comte le récit de ce glorieux fait d’armes.

— Cela fut si rapide, qu’à peine avons-nous eu le temps de nous rendre compte de ce qui arrivait. Les anarchistes envahissaient toutes les pièces et aussitôt chacun s’emparait de ce qui