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nationalités trop faibles pour se défendre, cette satisfaction d’amour-propre de ne la priver du fruit de ses rapines qu’après un plébiscite de ses victimes ! Mais ce serait sanctionner, après coup, la violation du droit des gens, dont elle s’était jadis rendue coupable. Ce serait reconnaître la légitimité, au moins précaire, de son titre de propriété !

Les théoriciens du pacifisme ont une singulière façon d’affirmer leurs principes, puisqu’ils ne font valoir ceux-ci qu’au bénéfice du peuple qui les a délibérément et constamment violés. Ils semblent monter la garde autour du bien mal acquis, en voulant entourer les nécessaires restitutions de formalités dont, seuls, les voleurs pourraient tirer quelque avantage.

La France reprend son bien, les Alsaciens-Lorrains retournent à leur Patrie perdue. Un point, c’est tout. La réintégration de nos provinces dans le territoire national n’aura sa pleine signification morale que si elle s’opère simplement, normalement, par le seul jeu des événemens.

L’Alsace-Lorraine allemande, c’est la frontière ouverte et Paris découvert, c’est la constante affirmation du droit du plus fort, c’est le symbole de cette unité artificielle de l’empire germanique qui se dresse comme une perpétuelle menace devant les faibles, c’est, depuis un demi-siècle, l’Europe en armes. Voilà ce qu’il ne faut jamais oublier quand on aborde le problème, dont la solution intéresse au même titre tous les peuples alliés.

Un journal allemand, la Freie Zeitung, rédigé par des démocrates de la vieille école, réfugiés en Suisse, a consacré à la question d’Alsace-Lorraine des articles curieux dont voici la conclusion :

« Il est donc établi :

« 1o Que l’Alsace n’a pas été volée par la France. Elle a passé, comme d’autres territoires, des mains d’une dynastie à celles d’une autre, à une époque où cela semblait tout naturel, comme par exemple le Tessin fut donné à la Suisse. Dans ce bon vieux temps, on changeait plus facilement de nationalité que de chemise.

« 2o Au point de vue des races, l’Alsace ne revient à personne (?), car il n’y a plus aujourd’hui de races pures dans aucun