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VISITES AU FRONT [1]

SUR LE FRONT ANGLAIS
(JUIN 1916)

I


VERS LES TRANCHÉES

Nous les avons vus pour la première fois du chemin de fer, à trois heures de Paris, dans un maigre et délicat paysage de Cazin : buttes et collines de sable, encadrant des morceaux de la mer et de l’horizon pâles ; traînées de pins et de genêts en fleurs. Tout le long de ces dunes, où l’on n’avait jamais connu que solitude, une immense ville de toile est répandue, où remue une population couleur de terre. Pendant une grande demi-heure, le train, qui suit la côte, la traverse dans sa longueur, en la dominant du haut du talus. Des centaines et des centaines de tentes jaunes, quelques-unes entr’ouvertes, pleines, par le contraste du sol éclatant, d’ombre fumeuse comme celle des gourbis arabes. Des hommes assis à l’orientale, sur le sable ; d’autres, immobiles, à l’exercice, en rangs précis comme des palissades surgies pour la défense de cette terre. Des groupes bleus, — la couleur d’hôpital : des malades, des blessés ; quelques chaises longues orientées vers la mer. Plus

  1. Voyez la Revue des 15 décembre 1916 et 1er janvier 1917.